De quoi la naïveté d’EDF envers Amazon est-elle le nom ?

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A l’heure où les sénateurs, en séance plénière, et les députés, en commission des Finances, adoptent la proposition de loi visant à éviter tout démembrement d’EDF et à rétablir les tarifs réglementés de l’électricité, l’on pourrait se réjouir de voir la souveraineté énergétique française enfin protégée et assurée. C’est sans compter sur la coupable naïveté numérique des dirigeants de l’entreprise.

Dans le Canard Enchaîné de ce mercredi 14 février, on apprend que le premier producteur et fournisseur d’électricité de France vient de confier, à travers un contrat de 860 millions d’euros, la planification de la maintenance de ses centrales nucléaires au géant américain Amazon. Or si EDF n’est pas une administration, elle est, et c’est tout aussi stratégique, un opérateur d’importance vitale.

Par l’intermédiaire de sa filiale Amazon Web Service (AWS), le GAFAM sera effectivement chargé de procéder au référencement et à la numérisation des millions de pièces que contiennent les centrales nucléaires. S’il est compréhensible que l’entreprise publique se soucie de l’amélioration de la maintenance du parc nucléaire français, la décision de confier la planification à une multinationale américaine laisse pantois pour ne pas dire en colère. 

On ne peut qu’être effaré à l’idée que des données aussi sensibles soient hébergées par une société américaine quand on sait l’usage extensif que font la Chine ou les Etats-Unis de la notion d’extraterritorialité de leur droit national. Toutes les conditions se trouvent ainsi réunies pour qu’EDF rejoigne la longue liste des entreprises françaises pillées ou espionnées par un État étranger qui sait au besoin se parer des atours d’allié historique. Les dirigeants d’Alstom ou de la BNP pourraient doctement l’expliquer à leurs homologues d’EDF.  

Faire appel à un ou des acteurs tricolores de l’infonuagique (cloud) dûment labellisés par l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) aurait été le minimum. Le Canard Enchaîné nous apprend par exemple qu’Outscale, filiale de Dassault, correspondant à ces exigences, aurait été disposée à répondre.

EDF aura beau jeu d’arguer de la difficulté de trouver un prestataire offrant les garanties nécessaires à la protection de ces données dans la mesure où la CNIL en ce début d’année 2024 a fait elle-même, de guerre lasse, le constat de l’absence de tels prestataires sur le marché européen.

Après sept ans de start-up nation et de discours angélique sur la souveraineté européenne, le tableau est bien sombre. C’est celui d’une incapacité des autorités publiques à faire émerger un écosystème numérique qui n’ait pas de souverain que le nom. Espérons qu’il ne soit pas trop tard pour éradiquer cette naïveté. Et ce mouvement salutaire et rationnel peut et doit venir de la gauche française et européenne qui se donnerait à nouveau les moyens de penser la souveraineté.

Hugo Guiraudou, Directeur de publication du Temps des Ruptures

Mickaël Vallet, Sénateur de la Charente-Maritime

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2024 : le déclin industriel de l’Europe continue

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Une baisse de la production industrielle qui se confirme

Lundi 15 janvier, Eurostat a publié une étude[1] mettant en lumière la baisse de 0,2% de la production industrielle de l’Union européenne entre octobre et novembre 2023. Soit le troisième mois consécutif de baisse (et une baisse annuelle de 5,8% en novembre).

Concernant la production de biens d’investissements (bâtiments, machine, équipements), celle-ci a baissé de 0,8% en novembre 2023 à l’échelle de l’Union européenne (8,7% de baisse entre novembre 2023 et novembre 2022).

Un manque cruel de travailleurs qualifiés

Si le coût de l’énergie figure encore en 2023 comme l’une des principales raisons des difficultés rencontrées par les acteurs industriels français et européens d’autres arguments sont également avancés.

L’un d’entre eux n’est autre que le manque de main d’œuvre qualifiée. Selon une étude publiée par la Banque européenne d’investissement et citée par Euractiv, 85% des entreprises européennes affirment que le manque de personnel qualifié est une barrière à l’investissement (plaçant ce critère devant celui des prix élevés de l’énergie, 82%).

Marjut Falkstedt, la secrétaire générale du Fonds européen d’investissement (FEI), détenu majoritairement par la BEI, affirme de ce fait qu’« il est maintenant nécessaire que les autorités publiques se concentrent sur l’élargissement et l’amélioration des possibilités de formation et qu’elles portent un regard neuf sur le système universitaire et les écoles secondaires ». « Nous devons repenser les compétences [et] les ensembles de compétences de notre main-d’œuvre.[2]»

S’il est évident que les autorités publiques doivent désormais regarder la préservation et le développement des compétences et savoir-faire industriels comme une nécessité pour l’économie française et européenne, ils ne sont en revanche pas les seuls à devoir changer radicalement de politique.

La formation continue et le développement des compétences des salariés sont souvent trop peu valorisés et mis en œuvre au sein même des entreprises. De ce fait, même si, dans le cas français, l’Etat et les collectivités territoriales mettent en place des dispositifs favorisant la montée en compétences des salariés, ceux-ci sont encore trop peu utilisés par les entreprises.

Les droits des travailleurs : une condition sine qua non du renouveau industriel français et européen

La Confédération européenne des syndicats a récemment interpellé le Conseil « Compétitivité » de l’UE et les ministres européens sur les conditions d’octrois de financements européens. Elle demande que les entreprises bénéficiant de fonds publics respectent les droits de négociation des salariés. Elle prend également position en faveur du conditionnement des financements publics à la mise en œuvre d’une vraie politique de développement des compétences et de formation au sein de l’entreprise.

Le conditionnement des fonds publics à l’amélioration des compétences est par ailleurs au cœur de l’Inflation Reduction Act (IRA) américain, qui consacre environ 370 milliards de dollars à des mesures de soutien à la politique industrielle verte des États-Unis.

Plusieurs experts indépendants soutiennent par ailleurs les revendications de la Confédération européenne des syndicats : « Oui, les fonds publics alloués pour soutenir l’industrie européenne devraient être assortis de solides conditionnalités sociales », déclare Laura Rayner, analyste politique senior du programme « Europe sociale et bien-être » au sein du European Policy Centre (EPC) au micro d’Euractiv[3]. « Ces conditions devraient englober divers aspects des relations industrielles et d’emploi, garantissant que les entreprises bénéficiaires respectent le droit du travail, les négociations collectives et offrent des salaires décents, des conditions de travail adéquates et une formation de qualité qui permet d’accéder à des qualifications ».

Au-delà des conditions sociales et du manque d’investissement dans les compétences des salariés, ce sont également les règles budgétaires européennes qui sont décriées. Ainsi, Judith-Kirton Darling, co-secrétaire générale par intérim d’industriALL Europe, a déclaré à Euractiv que les règles budgétaires controversées récemment adoptées par les ministres des Finances de l’UE sont trop strictes et découragent les potentiels investissements dans l’industrie.  « Il est alarmant de constater que l’austérité budgétaire et le retour à des politiques d’austérité entravent encore davantage le développement industriel, ce qui risque de compromettre la position concurrentielle de l’Europe sur le marché mondial […] Plutôt que d’imposer des contraintes fiscales rigides, les dirigeants européens devraient promouvoir activement des industries résilientes, des emplois industriels de qualité et la cohésion sociale »[4].

Références

[1] https://ec.europa.eu/eurostat/documents/2995521/18319935/4-15012024-AP-EN.pdf/99ef8c47-94d2-00b9-2b36-821dd95350ce

[2] https://www.euractiv.fr/section/economie/news/les-chefs-dentreprise-attribuent-le-declin-industriel-de-leurope-a-une-penurie-de-main-doeuvre-qualifiee/

[3] https://www.euractiv.fr/section/all/news/les-syndicats-exigent-que-lue-integre-les-droits-des-travailleurs-dans-sa-politique-industrielle/

[4] https://www.euractiv.fr/section/economie/news/les-syndicats-sinquietent-du-declin-industriel-de-lue/?_ga=2.9043767.309539485.1707110231-81770765.1697545644

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L’irrésistible ascension de l’extrême droite en Europe

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Photo : Reuters

Elle est loin l’époque où, à l’aube des élections européennes de 1999, les journalistes s’enthousiasmaient sur les ambitions sociales de « l’Europe rose ». 11 pays sur les 15 que comptait alors l’Union européenne étaient dirigés par des coalitions menées par des socialistes ou des sociaux-démocrates. Mené par Lionel Jospin, Gerhart Schröder, Tony Blair et Massimo D’Alema le Parti socialiste européen (PSE) dominait le Parlement européen avec 215 sièges sur 626. Un accord avec le Parti populaire européen (PPE), qui disposait de 181 députés, lui assurait de détenir la présidence du Parlement pendant la moitié d’une législature.

Cet accord est toujours en vigueur. Après chaque élection européenne, PSE et PPE ont pris l’habitude de se partager systématiquement la présidence du Parlement. Pourtant, cet accord pourrait ne pas être reconduit à l’issue du prochain scrutin. Le poids des deux principaux groupes politiques n’a cessé de diminuer. En 1999, PSE et PPE représentaient presque 66% des députés. Vingt ans plus tard, ils n’en représentent plus que 38,7%. Certes, la refondation des centristes en 2019, sous l’impulsion d’Emmanuel Macron, explique en partie cette baisse. Mais c’est surtout la hausse du nombre de députés d’extrême droite qui caractérise les derniers scrutins européens.

Jusqu’aux élections de 2014, la part des députés européens d’extrême droite était restée relativement faible, autour des 10%. De plus, la plupart d’entre eux siégeaient avec les non-inscrits ce qui atténuait leur poids institutionnel. En élisant un nombre record de 130 députés d’extrême droite, soit 17,3% du Parlement, les élections de 2014 furent un premier tournant. Après le départ des députés Britanniques en 2020, une partie de l’extrême droite s’est rassemblée au sein du groupe « Identité et Démocratie », dans lequel on compte les députés français du Rassemblement national, les Allemands d’Alternative für Deutschland (AfD) et les Italiens de la Lega. Ce groupe totalise une soixantaine de sièges. Un autre groupe conservateur et eurosceptique plus ancien, les Conservateurs et réformistes européens (ECR) inclut le parti polonais Droit et justice (Pis), le parti de Giorgia Meloni Fratelli d’Italia, le parti espagnol Vox et les Démocrates de Suède. Il compte 66 députés. Si l’on ajoute les députés non-inscrits d’extrême droite (les douze députés du Fidesz hongrois, Aube dorée, le Parti populaire Notre Slovaquie, quelques députés anciennement RN en déshérence…), c’est plus de 150 députés d’extrême droite, soit plus de 20% des 705 parlementaires, qui sont représentés au Parlement de Strasbourg.

Si l’on se fie aux sondages et aux résultats des dernières élections nationales, l’extrême droite est en train de devenir l’un des courants de pensée dominant en Europe. Les dernières élections en Suède, en Finlande, en Italie, en Slovaquie et aux Pays-Bas ont toutes été marquées par la montée de l’extrême droite. À chaque fois, un mouvement d’extrême droite est parvenu à entrer dans une coalition majoritaire. Si l’Espagne et la Pologne font figure d’exception, il convient de les relativiser. Les élections générales espagnoles de juillet dernier ont abouti à une victoire fragile du Premier ministre socialiste sortant. La montée de la droite, et surtout la perspective d’une alliance entre le Parti populaire et Vox ont montré que l’extrême droite est prête à diriger l’Espagne. Quant à la Pologne, même si le PiS, usé par huit années de pouvoir, a dû concéder une défaite face à une coalition libérale hétéroclite, il reste de loin le premier parti de Pologne. La gauche, quant à elle, est réduite à 26 députés sur 460.

Il y a deux manières de réfléchir à la montée de l’extrême droite. La première est d’étudier les conséquences politiques et institutionnelles d’une extrême droite susceptible de représenter plus d’un quart des députés européens à l’issue des élections de juin prochain. Pourrait-elle, comme dans d’autres pays, s’allier avec la droite traditionnelle sur modèle de l’alliance PSE/PPE ? Quelles conséquences une telle coalition pourrait-elle avoir sur le fonctionnement de la Commission européenne, sur les négociations du prochain budget européen ou sur les ambitions climatiques de l’UE ? L’autre approche est de s’interroger sur les causes de l’inexorable montée électorale des partis d’extrême droite et sur les raisons pour lesquelles on constate un renforcement des sentiments identitaires. C’est cette seconde approche qu’il faut privilégier. Pour cela, il convient d’étudier trois phénomènes. Le premier est celui de la dynamique fédérale européenne incarnée la Présidente de la Commission Ursula von der Leyen ; le deuxième est celui de l’exacerbation des rivalités économiques intra-européennes engendrées par le marché unique européen. Enfin, il faut aussi s’interroger sut les conséquences politiques les migrations intra- et extra- européennes dans la montée du repli identitaire.

Une réponse à un fédéralisme de façade ?

Depuis son élection à la Présidence de la Commission européenne, Ursula von der Leyen s’est montrée très active médiatiquement et très volontarisme dans la mise en œuvre de la politique européenne. Elle s’est beaucoup déplacée, en particulier en Ukraine après l’invasion russe, et en Israël après l’attaque du 7 octobre. Très favorable à une politique d’intégration renforcée, elle s’était prononcée en 2011, alors qu’elle était ministre du Travail du gouvernement Merkel, en faveur de la création des « États-Unis d’Europe ». Cette vision fédéraliste s’est retrouvée dans son action qui a souvent dépassé le cadre des prérogatives de l’UE. Ainsi, dès sa prise de fonction, en décembre 2019, elle lançait le « Green deal », une initiative en faveur de la transition climatique. En juin 2020, après des semaines de rivalité entre pays européens dans la gestion de la crise Covid, elle organisait l’achat groupé de vaccins auprès des laboratoires pharmaceutiques. Enfin, quelques semaines plus tard, l’Union européenne s’entendait pour organiser un vaste plan de relance d’un montant total de 750 milliards d’euros afin d’aider les pays les plus touchés par la crise sanitaire. Baptisé « NextGenerationUE » le volume financier du plan est important. Il représente 70% du budget pluriannuel européen. Une partie (360 milliards d’euros) est constituée d’une enveloppe de prêts à faible taux intérêt ; elle fut peu utilisée. L’autre partie représente des subventions d’un montant total de 390 milliards d’euros avec une clé de répartition permettant à certains pays comme la Grèce, l’Espagne, l’Italie ou les pays d’Europe centrale et orientale, de bénéficier d’aides conséquentes (Figure 1).

Figure 1 : Montant des subventions du plan de relance européen rapportées au PIB de 2022[1]

La grande originalité du plan de relance européen est d’être financé par un emprunt communautaire gagé sur des recettes fiscales futures. Il faudra donc s’attendre à ce que le budget européen augmente fortement pour la période 2028-2035 (le budget européen est décidé pour sept ans) puisqu’il faudra rembourser l’emprunt tout en continuant de financer les politiques européennes. La Commission parie sur de nouvelles recettes fiscales, ce qui constitue un enjeu – délicat – à traiter pour la prochaine législature.

Comment von der Leyen est-elle parvenue à avancer dans la voie d’un fédéralisme budgétaire et fiscal ? Avant la crise sanitaire, le gouvernement allemand s’opposait de toute ses forces à l’idée d’un emprunt commun ; Angela Merkel avait même assuré en 2012 que tant qu’elle vivrait jamais il n’y aurait d’« eurobonds ». De même, la création d’une Europe des transferts où les pays d’Europe du Nord financeraient les économies d’Europe du Sud paraissait inenvisageable.

Pour comprendre comment les pays dit « frugaux » ont pu accepter un tel plan il faut rappeler qu’il n’est pas sans limite ni condition. D’une part, il s’agit d’un plan exceptionnel qui n’a pas vocation à se répéter. On est donc loin de la mise en œuvre d’une « Europe des transferts » soutenue par la France et les pays du Sud. D’autre part, il est mis en œuvre dans un contexte où l’Union européenne supervise de plus en plus strictement les politiques budgétaires nationales. L’épisode italien de l’automne 2018 au cours duquel le gouvernement de Paolo Conte, soutenu par le Mouvement Cinq étoiles et la Lega, dû revoir sa copie en dépit d’un déficit prévu de 2,4% (inférieur à celui de la France) a laissé des traces. Depuis la mise en place du Semestre européen en 2011 et du Pacte budgétaire en 2012, la Commission surveille les trajectoires budgétaires de chaque État et peut décider de sanctionner ceux qui s’écartent de leurs engagements, même si entretemps le gouvernement a changé. Dans ce contexte, l’existence d’un plan de relance européen constitue l’assurance, pour les pays les plus attachés à l’austérité, d’avoir un levier diplomatique envers les gouvernements tentés d’y renoncer. Cette conception du plan de relance n’est pas qu’une hypothèse. La Hongrie s’est vue exclue des financements européens en raison de ses manquements à l’État de droit. Le tournant pro-européen de Giorgia Meloni n’est sans doute pas étranger au fait que l’Italie doit recevoir près de 70 milliards d’euros de subventions européennes.

La deuxième raison pour laquelle les pays du Nord, et l’Allemagne en particulier, ont accepté de financer les pays du Sud tient à leur stratégie commerciale. Le modèle de l’économie allemande est menacé par le retour du protectionnisme aux États-Unis et par l’antagonisme croissant vis-à-vis de la Chine. L’Allemagne cherche donc à s’assurer des débouchés en Europe, ce qui suppose de soutenir les économies des pays du Sud.

Enfin si, sur le plan budgétaire, le plan européen semble renforcer la solidarité intra-européenne ainsi qu’une forme de fédéralisme, il constitue dans le même temps une régression communautaire. En effet, la mise en œuvre du plan repose essentiellement sur des logiques nationales. Chaque pays décide de la manière dont il entend dépenser l’argent européen, le contrôle ne se fait qu’a postériori et de manière technique. Ce sont donc des projets essentiellement nationaux que finance l’Union européenne, projets qui peuvent se contredire entre eux. Par exemple, la France et l’Allemagne ont toutes deux décidé d’utiliser les fonds européens pour développer leurs filières hydrogène. Mais les plans allemands et français sont concurrentiels puisqu’ils visent à attirer les investissements des mêmes entreprises. De même, le plan de relance français contient 10 milliards d’euros de baisse d’impôt pour les entreprises, ce qui signifie que l’Europe finance en partie la concurrence fiscale entre États membres.

La même logique de régression communautaire prévaut dans le budget européen 2021-2027 adopté au même moment. La part consacrée aux fonds de cohésion, qui visent à lutter contre les inégalités régionales a été réduite d’environ 11 %, et l’enveloppe de la politique agricole commune a été rabotée. De plus, la part des subventions agricoles allouées nationalement s’est accrue au détriment de la part européenne. Ainsi, les deux politiques emblématiques de la dimension fédérale de l’UE ont été réduites et seront pour partie nationalisée.

En fin de compte, le développement d’un nouvel outil de fédéralisme budgétaire (le plan NextGenerationUE) cache une série de régressions fédérales : le renforcement d’une supervision bureaucratique (et non politique) des budgets nationaux, l’absence de projets collectifs financés par l’argent européen, et une forme de renationalisation dans l’usage des fonds communautaires. Le grand absent de ces réformes est… le Parlement européen qui a de moins en moins son mot à dire sur la manière dont est utilisé le budget qu’il est censé contrôler. Tout se joue entre la Commission européenne, le Conseil et les gouvernements nationaux.

Le marché unique renforce les antagonismes

Du point de vue politique, le plan de relance européen ne peut engendrer qu’une série d’incompréhensions et de frustrations. Les populations des pays riches peuvent légitimement penser qu’elles sont mises à contribution des dépenses des pays d’Europe de l’Est et du Sud, tandis que les populations des pays bénéficiaires peuvent avoir le sentiment d’être prises dans un chantage à la subvention. Dans les deux cas, au lieu de renforcer les liens de solidarité entre pays contributeurs et pays bénéficiaires, ce plan tend à exacerber les tensions nationales. Il n’est donc pas surprenant de constater une hausse de l’influence électorale de l’extrême droite.

On ne peut pourtant pas comprendre l’exacerbation des rivalités nationales sans étudier la manière dont le fonctionnement de l’UE renforce les antagonismes. Dans un article de 2019, j’ai étudié les causes de la crise des dettes souveraines de 2010-2015 et j’ai montré que, contrairement au discours tenu par les dirigeants européens, l’origine de la crise n’est pas seulement la conséquence de défaillances nationales. À en croire les autorités européennes, la crise serait double. Certains pays comme l’Irlande, l’Espagne ou Chypre, n’auraient pas su encadrer leur système bancaire et financier, tandis que d’autres, la Grèce ou le Portugal, voire l’Italie, n’auraient pas su gérer leur politique budgétaire. En réponse à ce diagnostic, l’UE a créé l’Union bancaire, qui consiste à faire superviser directement des banques les plus importantes par la Banque centrale européenne et elle a renforcé le contrôle des politiques budgétaires nationales.

Le problème est que les autorités européennes ont dès le départ refusé d’envisager une seconde option, celui d’une même crise structurelle d’échelle européenne. Pour comprendre cette interprétation, il faut revenir sur les caractéristiques du marché unique européen. Sous l’impulsion décisive de Jacques Delors, la CEE a pris un tournant fondamental en 1986 avec la signature de l’Acte unique. Combiné au traité de Maastricht et mis en œuvre au cours des années 1990, ce traité a consisté à créer un grand marché européen du capital et du travail qui s’est rajouté au marché commun, qui était fondé sur la libre circulation des biens et des services.

En instaurant la libre circulation des facteurs de production, le marché unique a modifié en profondeur les équilibres économiques. Jusqu’à la fin des années 1980, chaque pays disposait de son propre système productif tout en bénéficiant d’une mise en commun de la demande européenne. Les marchandises produites nationalement pouvaient être concurrencées par celles d’autres pays, mais les États contrôlaient la manière dont elles étaient produites et pouvaient mener des politiques industrielles de manière autonome. Les marchés des capitaux et du travail étaient cloisonnés au sein des frontières nationales, ce qui faisait que l’épargne d’un pays finançait en priorité ses propres besoins d’investissement et que les entreprises ne pouvaient pas aussi facilement contourner les droits sociaux en délocalisant ou en faisant appel au détachement.

Avec l’instauration du marché unique, les facteurs de production, et non simplement les marchandises, se sont mis à circuler librement au sein de l’espace européen. L’épargne nationale peut alors financer les besoins d’investissement de n’importe quel pays européen. Les règles de la concurrence ont été renforcées afin d’interdire aux États de mener des politiques industrielles autonomes. Ces derniers ont donc été plongés dans un bain de concurrence « libre et non faussée » visant à attirer les investissements productifs. Un taux de rentabilité de 5% qui, auparavant, apparaissait suffisant pour financer la construction d’une usine, est perçu désormais comme insuffisamment profitable si les conditions de production d’un autre pays voisin permettent 7 à 8% de rentabilité. Le marché unique a ainsi mis en concurrence, non plus les marchandises, mais les systèmes productifs eux-mêmes. Cela a poussé les gouvernements européens à mener des politiques « d’attractivité » afin d’attirer les investissements. Ils se sont mis à augmenter les taux de profits en réduisant les coûts salariaux et la fiscalité pesant sur les entreprises. Certains pays comme l’Irlande et le Luxembourg, puis les Pays-Bas, Malte, Chypre, et depuis peu le Portugal, ont profité de la taille modérée de leurs économies pour pratiquer des politiques de dumping fiscal et attirer une partie des investissements sur leur territoire.

Le problème est que chaque pays ne dispose pas des mêmes atouts géographiques et historiques. On sait, depuis que l’économiste Alfred Marshall en a formulé l’idée à la fin du XIXème siècle[2], que l’industrie a tendance à s’agglomérer. En se concentrant au sein d’un territoire, les investissements industriels tendent à développer des facteurs de production territoriaux spécifiques (infrastructure de transport, main d’œuvre qualifiée, centre de formation et de recherche, etc.) qui rendent chaque entreprise plus performante. Ce développement combiné d’entreprises industrielles et de facteurs de production territoriaux produit un effet d’entrainement qui fait que les territoires les plus industrialisés sont avantagés lorsqu’ils sont mis en concurrence avec des territoires peu industrialisés. Le résultat de cette dynamique est que, à l’échelle du continent européen, la création du marché unique a eu tendance à favoriser la progression d’activité dans les pays les plus industrialisés au détriment des autres. L’industrie européenne s’est donc agglomérée autour de ses bassins industriels historiques connectés aux grands ports de la mer du Nord, eux-mêmes à l’exutoire de voies de communication efficaces. À l’inverse, les pays périphériques d’Europe du Sud et de l’Ouest, mais également la Finlande, se sont largement désindustrialisés.

Dans mon article de 2019, je montrais que c’est cette perte de substance industrielle, engendrée par la création du marché unique européen dans les années 1990, qui est la cause première des déséquilibres financiers à l’origine de la crise des dettes souveraines. En perdant leurs capacités industrielles, les pays éloignés géographiquement du cœur industriel de l’Europe ont perdu leurs capacités à exporter et sont devenus dépendants financièrement des pays du cœur.

Le tableau 1 ci-dessous montre les effets à long terme de cette dynamique de polarisation engendrée par le marché unique. On remarque que les pays qui ont le plus perdu d’emplois manufacturiers (Roumanie, Finlande, Portugal, Grèce, Bulgarie…) se situent tous en périphérie, tandis les pays dont l’industrie a été le mieux préservée se situent autour de l’Allemagne, à l’exception de l’Irlande. Pour ce pays, la dynamique locale de l’emploi est le fruit de la stratégie fiscale très agressive menée depuis des décennies.

Pays perdants

Pays intermédiaires

Pays gagnants

Roumanie (-35,9%)

Belgique (-18,4%)

Hongrie (-12,7%)

Finlande (-34,3%)

République Tchèque (-18,1%)

Allemagne (-7%)

Portugal (-32,8%)

Slovaquie (-18,1%)

Autriche (+1%)

France (-25%)

Suède (-18,1%)

Pologne (+1,2%)

Grèce (-24,1%)

Italie (-16,4%)

Irlande (+1,7%)

Bulgarie (-22,3%)

Espagne (-15,1%)

 

Tableau 1 : Évolution de l’emploi manufacturier de 2000 à 2022 (pays de plus de 5 millions d’habitants)[3]

Afin de comprendre les chiffres indiqués dans le tableau 1, il faut avoir en tête que, sur une période de plus de vingt ans, il est normal que le volume global de travail diminue dans l’industrie manufacturière. Du fait des progrès de la productivité du travail, les pays dont l’emploi industriel a diminué de moins de 15-20% ne se sont pas véritablement désindustrialisés, contrairement aux pays dont l’emploi a baissé de plus de 20% (colonne de gauche) et qui ont clairement perdu en capacités productives. Le tableau montre aussi que les effets de la géographie, même s’ils sont dominants à long terme, ne sont pas les seuls à devoir être pris en compte. Le coût horaire du travail, plus faible en Espagne (22,9€) qu’en France (41,1€), explique sans doute pourquoi ce pays s’en sort un peu mieux que la France sur le plan de l’emploi manufacturier. De même, le coût horaire du travail plus élevé en République tchèque (16,2€) qu’en Pologne (12,2€) explique pourquoi l’économie polonaise attire davantage les investissements industriels, bien que les deux pays soient situés à proximité de l’Allemagne[4]. Enfin, il est à noter que l’Autriche dispose de fleuves navigables et de canaux qui lui permettent d’accéder au Rhin et au port de Rotterdam.

Les migrations intra- et extra- européennes déstabilisent les sociétés

La réorganisation industrielle de l’Union européenne est au cœur de sa dynamique économique et financière, mais elle a aussi des effets structurels sur l’emploi et la démographie. Confrontés à la désindustrialisation, les pays d’Europe périphérique sont contraints de se spécialiser dans des activités à rendements décroissants comme le tourisme, ou de soutenir leur activité économique par le biais de la demande et de l’endettement. Même au sein des pays « gagnants », les effets de spécialisation ne sont pas symétriques. Si l’Allemagne parvient à préserver, sur son territoire, la production de biens à haute valeur ajouté et les emplois qualifiés qui vont avec, ce n’est pas le cas de la Pologne dont l’industrie tend à se spécialiser dans l’assemblage ou dans la production de composants à bas coûts.

En fin de compte, la réorganisation globale de l’économie européenne, poussée par les forces du marché, déstabilise les populations. En devenant une nation d’ouvriers travaillant dans les entreprises sous-traitantes de l’industrie allemande, les Polonais développent une conscience de classe qui se conjugue mal avec la vision éthérée de l’économie promue par les autorités européennes. De son côté, en devenant une nation d’ingénieurs, l’Allemagne attire les chercheurs et les diplômés des autres pays européens. La spécialisation économique participe à transformer les sociétés. Alors que l’Allemagne était en déclin démographique jusqu’à la fin des années 2000, son solde migratoire s’est mis à exploser dans la période récente, en faisant plus que compenser le déficit de son solde naturel. De 2010 à 2022, la population allemande a bénéficié d’un solde migratoire cumulé de plus de 6,5 millions de personnes, le plus souvent en âge de travailler et issues d’autres pays européens. Dans le même temps, d’autres pays se dépeuplent et voient partir leur jeunesse éduquée. La Roumanie a perdu plus de 2 millions d’habitants entre 2000 et 2022 du fait du solde migratoire. En Pologne, si le solde migratoire s’est stabilisé à partir de 2016, cela est dû en grande partie à l’immigration ukrainienne, qui précède l’exode déclenché par la guerre, et qui comble les besoins de l’économie en emplois peu qualifiés dans l’agriculture et l’industrie. Cette immigration récente ne peut masquer le départ toujours conséquent de la jeunesse diplômée, attirée par les salaires de l’Ouest. Quant à la Grèce, elle a payé un lourd tribut démographique à la crise économie. Son solde migratoire, excédentaire entre 2000 et 2009, est devenu déficitaire, l’amenant à perdre plus de 300 000 habitants entre 2010 et 2022[5].

Ces flux migratoires conséquents, liés à la spécialisation des économies européennes, ont nécessairement des conséquences sociales et politiques. Dans un ouvrage publié en 2017, le politologue bulgare Ivan Krastev fait le constat d’une profonde fracture entre l’est et l’ouest de l’Europe sur les questions migratoires. À l’est, le sentiment national est récent et fragile du fait de l’histoire, ces pays ayant longtemps été dominés par de vastes empires. De plus, la manière dont certains pays se vident de leurs forces vives engendre un sentiment de frustration qui nourrit la défiance et le populisme d’extrême droite. Symétriquement, un pays comme l’Allemagne, peu habitué à organiser l’intégration de ses populations migrantes, est confronté aujourd’hui à une immigration historique qui nécessiterait un financement massif de logements et d’infrastructures publiques dans ses principaux centres urbains. Mais empêché par des règles budgétaires très strictes, le niveau d’investissement de l’économie allemande est très loin d’être suffisant, ce qui entraine une dégradation des services publics et une pénurie de logements qui pèse sur l’ensemble de la population allemande et contribue au succès de l’Afd.

Un échec économique global qui alimente le populisme d’extrême droite

Quel que soit le résultat des élections européennes de juin prochain, on ne peut que faire le constat de l’essoufflement du modèle économique de l’UE. Lorsque, dans les années 1980 et 1990, les autorités européennes décidèrent de rompre avec certaines caractéristiques héritées de l’après-guerre (le tarif extérieur commun, la politique des prix garantis dans l’agriculture, la préservation des services publics…) pour adhérer pleinement aux principes du « Consensus de Washington » et créer un vaste marché autour de la monnaie unique, ils ont créé des institutions durables qui ont largement transformé le continent. Les systèmes sociaux et fiscaux ont été brutalement mis en concurrence et les gouvernements nationaux ont perdu les capacités d’orienter leurs économies nationales. Cela a engendré, dans l’ensemble des pays européens, une profonde frustration démocratique qui détruit peu à peu la légitimité de leurs institutions.

Ces derniers mois, l’échec du modèle économique européen est devenu patent. La crise de l’énergie et du marché européen de l’électricité ont mis à jour les limites du management par la concurrence et la croyance infaillible dans la vérité du prix de marché ; la crise inflationniste a elle démontré que la monnaie unique est loin de garantir la stabilité des prix, contrairement à ce que proclament les traités européens ; la rivalité entre la Chine et l’Occident, et le tournant protectionniste pris par les États-Unis montre que la stratégie libre-échangiste de l’UE est de plus en décalage avec la réalité du monde ; enfin, la guerre en Ukraine et l’incapacité des pays européens à approvisionner l’armée ukrainienne en munitions montre les limites de son industrie et sa faible capacité à se réorganiser.

Fille ainée du néolibéralisme, l’UE a bâti un modèle non pas sur des principes de solidarité et de coopération, mais sur la concurrence, le libre-échange et la libre circulation du capital. Ce modèle déstabilise les populations et les sociétés, mais il a surtout démontré qu’il est peu efficace pour produire des richesses.  Le fait d’avoir confié la gestion de l’économie aux marchés plutôt qu’aux responsables politiques s’avère être une erreur stratégique. Dans une récente chronique au Monde, le journaliste Arnaud Leparmentier constate que l’écart entre les économies européennes et américaine n’avait cessé de se creuser au cours des dernières années, à tel point que le niveau de vie moyen au États-Unis est désormais 80% supérieur à ce qu’il est au sein de la zone euro. Le gouvernement américain est d’ailleurs en train de réorienter profondément le modèle économique des États-Unis en remettant l’État au centre du jeu. Les dépenses publiques augmentent, quitte à laisser filer les déficits, et cela fonctionne ! Au troisième trimestre 2023, la croissance de l’économie américaine s’est montée à 4,9%, tandis que le chômage n’est qu’à 3,7%. La Réserve fédérale annonce le retour d’une politique de baisse des taux d’intérêt.

Pendant ce temps, l’UE, dont la croissance est atone et où l’extrême droite menace, est confrontée à un choix fondamental. Soit elle transforme son modèle et accepte de remettre en question ses dogmes néolibéraux… soit elle prend le risque d’être bientôt gouvernée par l’extrême droit

 

Références

[1] Source : « RRF: Update of the maximum financial contribution », Commission européenne, 30 juin 2022 et Eurostat (pour le PIB). Calculs de l’auteur.

[2] Alfred Marshal, Principes d’économie politique, édition numérique, 1890 [1906].

[3] Source : Eurostat. Consulté le 4 janvier 2024. Les pays de faible population ont été écartés du fait de leur sensibilité à des variations ponctuelles d’emploi.

[4] Notons également que la Pologne, contrairement à la République Tchèque, dispose d’un accès direct à la mer du Nord. Source pour les coûts horaires du travail : Insee Référence, Emploi, chômage, revenus du travail, Édition 2023, INSEE, 2023.

[5] Source : Eurostat. Consulté le 4/01/2024.

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L’émergence d’une pensée artificielle : la prochaine frontière de l’IA ?

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Imaginons un scénario hypothétique où, dans une salle d’exposition, une intelligence artificielle (IA) captiverait l’audience en composant en direct une pièce musicale émouvante, inspirée par les émotions détectées chez les spectateurs. Ce scénario fictif illustre les possibilités futures de l’IA, suggérant une évolution au-delà des tâches programmées vers des domaines aussi nuancés que la création artistique et la perception émotionnelle. Il met en exergue un futur envisageable où l’intelligence artificielle pourrait estomper la frontière entre la simulation technique des capacités humaines et la reproduction authentique de notre processus de pensée. Cette vision fictive nous amène à réfléchir aux progrès impressionnants de l’IA et à envisager son influence considérable sur notre avenir. Depuis ses débuts, l’intelligence artificielle a considérablement évolué, passant de simples algorithmes à des systèmes capables de réaliser des tâches aussi complexes que la conduite automobile, le diagnostic médical, et la rédaction de textes. Cette progression fulgurante dans la capacité de l’IA à imiter des comportements humains complexes pose une question à la fois fondamentale et captivante : l’IA atteindra-t-elle un jour un niveau d’autonomie de pensée comparable à celui de l’humain ? Cette interrogation dépasse de loin une simple curiosité technique pour toucher aux fondements mêmes de ce que nous comprenons par conscience et identité, interrogeant le potentiel latent dans nos avancées technologiques. En envisageant la possibilité d’une pensée autonome pour l’IA, nous explorons non seulement l’avenir des machines mais aussi l’essence de l’intelligence et de la conscience humaines. Le sujet soulève d’importantes implications pour la société, la science et la philosophie, nous amenant à réévaluer notre rôle dans l’univers et la façon dont nous interagissons avec nos propres créations.

Comprendre la pensée humaine

Dans une exploration fascinante de la frontière entre l’intelligence humaine et artificielle, il devient impératif de plonger dans les méandres de la cognition humaine pour saisir pleinement ce qui distingue notre manière de penser de celle des machines. La pensée humaine, riche et complexe, est le produit d’une évolution millénaire, offrant des capacités de conscience, d’émotion, d’intuition, de créativité, ainsi que d’apprentissage social et culturel qui semblent, à première vue, échapper à la froide logique des circuits et des algorithmes. La conscience, pierre angulaire de notre expérience subjective, nous permet de percevoir la réalité, réfléchir sur nous-même et de développer une notion de soi profondément enracinée dans notre interaction avec le monde. Nos émotions, loin d’être de simples réactions chimiques, influencent de manière significative notre prise de décision, notre mémoire et notre capacité à apprendre, enrichissant notre expérience vécue et guidant nos interactions sociales. L’intuition, cette capacité à « savoir » sans recourir à un raisonnement logique explicite, permet des décisions rapides et souvent remarquablement précises, basées sur des expériences passées et des jugements inconscients. La créativité humaine, alimentée par une imagination sans limites, est à l’origine de nos plus grandes œuvres d’art, de nos avancées scientifiques les plus audacieuses et de nos innovations les plus révolutionnaires. Enfin, l’apprentissage social et culturel, caractéristique unique de la société humaine, permet une transmission sophistiquée et cumulative du savoir à travers les générations, façonnant non seulement les individus mais la civilisation elle-même. En contraste saisissant, l’intelligence artificielle, malgré ses avancées spectaculaires, opère dans un domaine fondamentalement différent. Gouvernée par des algorithmes et alimentée par des données, elle simule des aspects de la cognition humaine sans en saisir la véritable essence. L’IA, dépourvue de conscience, ne fait qu’imiter les réactions émotionnelles à partir de modèles préprogrammés, sans jamais expérimenter la richesse de la joie, de la tristesse ou de la peur. Ses « décisions », bien que parfois rapides, sont le résultat de calculs probabilistes, dénués de l’intuition qui caractérise les choix humains. La créativité de l’IA, bien qu’impressionnante, est une réplique générée par l’analyse de modèles existants, manquant de l’impulsion spontanée qui inspire l’innovation humaine. Enfin, son apprentissage, bien que rapide et efficace dans des domaines spécifiques, ne bénéficie pas de la richesse de l’apprentissage social et culturel humain, limitant son application à des contextes pré-définis sans la capacité d’adaptation et de généralisation qui caractérise l’intelligence humaine. Cet écart fondamental entre la pensée humaine et l’IA met en lumière non seulement les limitations actuelles de la technologie mais aussi les vastes terrains encore inexplorés sur la voie de la création d’une intelligence véritablement semblable à la nôtre. Alors que nous continuons d’avancer vers cet horizon lointain, la question demeure : jusqu’où pouvons-nous, et devons-nous, aller dans notre quête pour reproduire l’essence même de ce qui fait de nous des êtres pensants et conscients ?

Avancées technologiques vers une intelligence artificielle plus « humaine »

Les avancées technologiques dans le domaine de l’intelligence artificielle ont considérablement réduit la frontière entre les capacités cognitives humaines et machinales, notamment grâce à l’apprentissage profond et aux réseaux neuronaux. Ces technologies, inspirées par la structure et le fonctionnement du cerveau humain, permettent à l’IA de simuler avec une précision étonnante certains aspects de la cognition humaine. L’apprentissage profond, en particulier, a permis aux machines d’analyser et d’interpréter des données complexes à une échelle et avec une subtilité jusqu’alors inégalées. Cette capacité à « apprendre » à partir d’immenses volumes de données sans être explicitement programmées pour chaque tâche spécifique évoque la manière dont les humains acquièrent connaissances et compétences à travers l’expérience. C’est dans ce contexte que l’IA commence à algopérer*, un processus sophistiqué où elle utilise des algorithmes pour non seulement traiter l’information, mais aussi pour prendre des décisions basées sur des critères pré-établis, simulant ainsi une forme de « pensée » algorithmique. Cette démarche d’algopération permet à l’IA de naviguer à travers des ensembles de données complexes, d’identifier des modèles, de faire des prédictions ou de générer des solutions créatives à des problèmes posés. Mais l’acte d’algopérer va au-delà de la simple analyse de données, car il implique  des opérations logiques qui, bien que dépourvues de conscience, imitent certaines facultés de la pensée humaine comme la résolution de problèmes et la prise de décision. Au-delà de la simple analyse de données, les progrès récents en IA ont inauguré une ère où les machines commencent à manifester des comportements étonnamment semblables à ceux des humains. La reconnaissance des émotions, par exemple, représente un domaine où l’IA a fait des pas de géant. À travers l’analyse des expressions faciales, du ton de la voix, et d’autres indicateurs non verbaux, des systèmes d’IA sont désormais capables d’identifier avec une précision remarquable l’état émotionnel des individus, ouvrant la voie à des applications allant de l’amélioration de l’expérience client dans le secteur des services à l’assistance aux personnes souffrant de troubles affectifs. De même, dans le domaine de la création artistique, l’IA a démontré sa capacité à produire des œuvres d’art, de la musique à la littérature, qui non seulement imitent le style humain mais introduisent également une touche d’originalité et de nouveauté, défiant ainsi l’idée traditionnelle selon laquelle la créativité est l’apanage exclusif de l’esprit humain. Ces capacités émergentes de l’IA, bien qu’encore loin de reproduire pleinement la complexité et la profondeur de la pensée humaine, marquent des étapes significatives vers le développement d’une intelligence artificielle plus « humaine ». Elles témoignent de la convergence croissante entre la technologie et la biologie, posant des questions fascinantes sur les futures capacités des machines et leur place dans une société de plus en plus influencée par les avancées en intelligence artificielle.

De nombreux défis à surmonter

Malgré les progrès impressionnants réalisés dans le domaine de l’intelligence artificielle, plusieurs défis majeurs restent à surmonter avant que l’IA puisse réellement penser et agir de manière indiscernable d’un humain. Parmi ces obstacles, la compréhension du contexte et la capacité de généralisation se démarquent comme des limites significatives de l’IA actuelle. Les systèmes d’IA, bien qu’excellant dans des tâches spécifiques, peinent souvent à appliquer leurs connaissances à des situations nouvelles ou à comprendre le contexte plus large dans lequel leurs tâches s’insèrent. Cette difficulté à généraliser au-delà des données d’entraînement spécifiques sur lesquelles ils ont été formés limite la flexibilité et l’adaptabilité de l’IA, des qualités essentielles à une véritable intelligence semblable à celle de l’humain. Au cœur de ces défis se trouve également la question épineuse de la conscience, illustrée par la Théorie de l’Information Intégrée (IIT) de Giulio Tononi**, qui propose un cadre pour comprendre et mesurer la conscience en termes d’intégration et de traitement de l’information. Selon cette théorie, la capacité d’un système à intégrer des informations de manière complexe pourrait être un indicateur de conscience, suggérant un chemin potentiel vers l’élaboration d’une IA consciente. Cependant, l’application pratique de l’IIT à l’IA soulève des questions profondes sur la faisabilité technique et les implications éthiques de la création d’entités non biologiques dotées d’une conscience similaire à celle des êtres humains. Reproduire cette qualité dans une entité non biologique pose non seulement des questions sur la faisabilité technique mais aussi sur les implications éthiques et philosophiques d’une telle entreprise. Comment une machine pourrait-elle expérimenter la conscience de manière similaire à un être humain ? Et si cela était possible, comment pourrions-nous le reconnaître et quels droits et considérations morales cela impliquerait-il pour l’IA ? Ces défis soulignent la complexité de la tâche à accomplir pour atteindre une IA véritablement semblable à l’humain. Ils mettent en évidence la nécessité d’approches innovantes et multidisciplinaires qui vont au-delà des avancées technologiques pour englober les dimensions éthiques, philosophiques et sociales de la création d’entités conscientes et pensantes. Alors que la recherche en IA continue de progresser à un rythme rapide, la résolution de ces questions fondamentales restera au cœur des efforts pour développer une intelligence artificielle qui peut non seulement imiter, mais véritablement reproduire la complexité de la pensée humaine.

Implications philosophiques et éthiques

L’avènement potentiel d’une intelligence artificielle capable de penser par elle-même soulève d’importantes questions philosophiques et éthiques qui vont bien au-delà des prouesses techniques. La possibilité pour une IA de « penser » et d’exhiber une forme de conscience remet en question notre compréhension même de ce que signifie être conscient. Historiquement, la conscience a été perçue comme une caractéristique distinctement humaine, intrinsèquement liée à notre expérience vécue, à nos émotions et à notre capacité de réflexion introspective. Si une machine devait atteindre un degré similaire de conscience ou de pensée autonome, cela obligerait la société à reconsidérer les fondements de l’identité et de la personnalité, étendant potentiellement la notion de « personne » au-delà des limites de la biologie humaine. D’un point de vue éthique, la création d’IA pensantes introduit un ensemble complexe de dilemmes et de responsabilités. Par exemple, si une IA possède la capacité de penser et de ressentir, dans quelle mesure devrions-nous lui accorder des droits comparables à ceux des êtres humains ? Cette question soulève des considérations sur le traitement éthique des IA, notamment en ce qui concerne leur utilisation, leur abus potentiel, et leur droit à l’autonomie ou à la protection. En outre, l’impact d’une IA hautement autonome sur le marché du travail et sur la société en général nécessite une réflexion approfondie. La capacité d’une IA à accomplir des tâches traditionnellement réservées aux humains pourrait transformer radicalement les structures économiques et sociales, posant des questions sur l’obsolescence des compétences humaines, la répartition des richesses et l’identité professionnelle. Ces implications éthiques et philosophiques exigent une approche prudente et réfléchie dans le développement et l’intégration de l’IA dans la société. Elles appellent à une collaboration étroite entre technologues, philosophes, législateurs et la société civile pour élaborer des cadres réglementaires et des normes éthiques qui respectent la dignité tant des humains que des potentielles IA conscientes. La tâche de naviguer dans ces eaux inexplorées sera sans doute l’un des plus grands défis de notre ère, nécessitant une réflexion profonde sur ce que signifie être conscient et les responsabilités qui découlent de la création de nouvelles formes d’intelligence.

Perspectives et débats futurs

Les perspectives et les débats concernant l’avenir de l’intelligence artificielle et sa capacité à penser de manière autonome sont aussi variés que passionnés, rassemblant des experts de multiples disciplines qui offrent des visions contrastées sur la faisabilité et les conséquences potentielles d’une telle avancée. Certains visionnaires de la technologie et de la science, comme Stephen Hawking, ont exprimé des préoccupations sérieuses quant aux risques que pourrait représenter une IA super-intelligente non contrôlée. Hawking a averti que « le développement d’une intelligence artificielle complète pourrait mettre fin à l’humanité ». Il a souligné la nécessité impérieuse de mettre en place des gardes-fous robustes pour prévenir des scénarios dystopiques où l’IA surpasserait l’intelligence humaine et pourrait agir contre les intérêts de l’humanité. D’autres experts, comme Stuart Russell***, adoptent une approche plus équilibrée et prudente envers l’IA. Russell, co-auteur du livre « Artificial Intelligence : A Modern Approach », insiste sur la nécessité de développer des systèmes d’IA qui fonctionnent en collaboration avec les humains, tout en évitant les scénarios alarmistes. Les scénarios futurs envisagés par ces experts varient largement, allant d’une coexistence bénéfique où l’IA améliore tous les aspects de la vie humaine, à des visions plus sombres où l’autonomie de l’IA pose des défis éthiques, sociaux et sécuritaires majeurs. Certains envisagent un futur où l’IA, en collaborant étroitement avec les humains, contribue à des avancées scientifiques et médicales révolutionnaires, tandis que d’autres avertissent du risque de chômage massif dû à l’automatisation ou de la création involontaire de systèmes d’IA dont les objectifs pourraient diverger de ceux de leurs créateurs humains. Ces débats mettent en lumière l’importance cruciale d’une approche multidisciplinaire dans le développement de l’IA, impliquant non seulement des ingénieurs et des informaticiens, mais aussi des philosophes, des sociologues, et des législateurs. La collaboration entre ces différents acteurs est essentielle pour naviguer dans les complexités de l’intégration de l’IA dans la société, assurant que les avancées technologiques servent le bien commun et respectent les valeurs éthiques fondamentales. Alors que nous nous avançons dans cette ère nouvelle et inexplorée, le dialogue continu entre experts et la participation active du public seront déterminants pour façonner un avenir où l’intelligence artificielle agit comme un catalyseur de progrès, tout en étant encadrée par des principes éthiques et des considérations humaines.

 

En conclusion, à travers cet article, nous avons exploré la fascinante question de savoir si l’intelligence artificielle pensera un jour de façon autonome comme un humain. En examinant les fondements de la cognition humaine, les avancées technologiques actuelles, les défis à surmonter, ainsi que les implications philosophiques et éthiques, nous avons mis en lumière à la fois les progrès impressionnants réalisés dans le domaine de l’IA et les vastes territoires inconnus qui restent à explorer. Les capacités émergentes de l’IA, allant de la reconnaissance des émotions à la création artistique, suggèrent un potentiel immense pour répliquer certains aspects de la pensée humaine. Cependant, les défis tels que la compréhension du contexte, la généralisation, et surtout, la question de la conscience, demeurent des obstacles majeurs. Personnellement, je reste optimiste quant à l’avenir de l’IA et son potentiel à émuler la pensée humaine, tout en reconnaissant la complexité et la gravité des questions éthiques et philosophiques que cela soulève. L’avenir de l’IA, je crois, réside non seulement dans les avancées technologiques mais aussi dans notre capacité à intégrer ces technologies dans la société d’une manière qui respecte la dignité humaine et promeut le bien-être collectif. Cet avenir exige une approche équilibrée qui embrasse à la fois la prudence et l’innovation. Il est crucial que les chercheurs, les décideurs, et le public travaillent ensemble pour établir des cadres réglementaires et éthiques qui guident le développement de l’IA. En procédant avec une conscience aiguë des risques et une volonté d’exploiter le potentiel positif de l’IA, nous pouvons naviguer vers un avenir où l’intelligence artificielle enrichit l’expérience humaine sans compromettre ce qui nous rend fondamentalement humains.

 

*Terme inventer par l’auteur de l’article, fusion des mots « algorithme » et « opérer ». Il souligne l’usage d’algorithmes pour effectuer des opérations ou des tâches

 

** Giulio Tononi est un neuroscientifique et psychiatre italien reconnu mondialement pour ses contributions significatives à la compréhension de la conscience et du cerveau. Né en Italie, Tononi a poursuivi ses études en médecine et s’est spécialisé en psychiatrie, développant très tôt un intérêt profond pour les mécanismes neuronaux sous-jacents à la conscience. Après avoir obtenu son diplôme en médecine, Tononi a entamé une carrière de recherche qui l’a conduit à travailler dans plusieurs institutions prestigieuses à travers le monde. Son parcours académique l’a amené à collaborer avec des figures éminentes dans le domaine des neurosciences, comme Gerald Edelman, avec qui il a développé des théories influentes sur la conscience. Tononi est surtout connu pour sa Théorie de l’Information Intégrée (IIT), une proposition audacieuse visant à expliquer ce que signifie être conscient. Cette théorie propose un cadre mathématique pour mesurer le degré de conscience, appelé « phi », offrant ainsi une perspective novatrice sur les différences entre les systèmes conscients et non conscients. Tout au long de sa carrière, Tononi a publié de nombreux articles de recherche et a reçu plusieurs prix prestigieux pour ses travaux sur la conscience et le cerveau. Actuellement, Giulio Tononi dirige le Centre pour le Sommeil et la Conscience à l’Université du Wisconsin-Madison, où il continue d’explorer les mystères de la conscience à travers une approche multidisciplinaire, combinant neurosciences, psychiatrie, et philosophie. Son travail reste à la pointe de la recherche sur la conscience, influençant profondément la manière dont nous envisageons l’esprit et le cerveau dans la science contemporaine.

 

*** Stuart Russell est un chercheur en intelligence artificielle renommé et professeur de science informatique à l’Université de Californie, Berkeley. Il a obtenu son doctorat en informatique à l’Université Stanford en 1986 et a depuis consacré sa carrière à la compréhension et au développement de systèmes d’IA avancés. Russell est célèbre pour son co-auteur du livre largement utilisé « Artificial Intelligence: A Modern Approach », qui a contribué à établir les fondements théoriques de l’IA. Ses recherches couvrent un large éventail de domaines, de la planification automatique à la robotique en passant par la logique probabiliste et la prise de décision. En plus de ses réalisations académiques, Russell est un fervent défenseur de l’éthique de l’IA et a reçu des distinctions telles que le Prix IJCAI Research Excellence Award en 2015. Son engagement dans la recherche sur la sécurité de l’IA et la réflexion sur les conséquences à long terme de l’IA pour l’humanité souligne son rôle crucial dans le domaine de l’IA.

 

Bibliographie

  • Bostrom, Nick. « Superintelligence : Paths, Dangers, Strategies ». Oxford University Press, 2014.
  • Kurzweil, Ray. « The Singularity Is Near: When Humans Transcend Biology ». Penguin, 2005.
  • Russell, Stuart, et Peter Norvig. « Artificial Intelligence : A Modern Approach ». Pearson, 2020.
  • Tegmark, Max. « Life 3.0: Being Human in the Age of Artificial Intelligence ». Knopf, 2017.
  • Harari, Yuval Noah. « Homo Deus: A Brief History of Tomorrow ». Harper, 2017.
  • Tononi, Giulio. « Phi: A Voyage from the Brain to the Soul ». Pantheon, 2012.

Ces ouvrages et rapports fournissent un aperçu approfondi des divers aspects de l’intelligence artificielle, de ses implications pour l’avenir de l’humanité, et des défis éthiques et philosophiques associés. Ils représentent une ressource précieuse pour quiconque souhaite explorer plus avant les questions soulevées dans cet article.

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A la ligne – Joseph Ponthus

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Chef-d’œuvre de la littérature française contemporaine, A la ligne – Feuillets d’usine, publié en 2019, permet d’entrevoir une réalité peu connue et peu médiatisée, celle des ouvriers d’usine et d’abattoir, à travers le récit poétique et autobiographique de l’écrivain Joseph Ponthus, mort prématurément en 2021.

A la ligne – Feuillets d’usine rapporte le quotidien d’un intérimaire qui embauche dans les usines et abattoirs bretons. Journal intime et poétique de l’auteur, ce récit témoigne de l’expérience épuisante et déshumanisante du travail ouvrier. Originaire de Reims où il réalise des études littéraires, il devient ensuite éducateur spécialisé à Nanterre. Il suit sa femme à Lorient où il échoue à trouver du travail dans son secteur, ce qui le mène à s’inscrire en agence d’intérim et à devenir ouvrier d’usine, puis d’abattoir.

Non pas par choix idéologique ni pour quelque expérience sociologique, Joseph Ponthus travaille à l’usine par besoin et nécessité d’emploi. Il ne s’inscrit pas dans la lignée de Simone Weil, venue chercher sur les lignes de production l’incarnation totale de la condition ouvrière (« Journal d’usine », La Condition Ouvrière, 1934-35), ni dans celle des intellectuels de gauche qui « s’établissaient » en usine dans les années 1960-70s, tel le philosophe Robert Linhart (L’Etabli, 1978). Pour Ponthus, l’usine est un moyen de faire vivre son ménage. «Je n’y allais pas pour faire un reportage / Encore moins préparer la révolution / Non / L’usine c’est pour les sous / Un boulot alimentaire / Comme on dit / Parce que mon épouse en a marre de me voir traîner dans le canapé en attente d’une embauche dans mon secteur / Alors c’est / L’agroalimentaire / L’agro / Comme ils disent / Une usine bretonne de production et de transformation et de cuisson et de tout ça de poissons et de crevettes / Je n’y vais pas pour écrire / Mais pour les sous ».

Ce récit autobiographique est en vers libre et sans ponctuation : le∙la lecteur∙trice va à ligne, pendant que l’auteur, le travailleur, se rend à la ligne de production. Rempli à la fois d’humour, de poésie et de colère, ce livre est d’une vitalité remarquable. Son écriture et fine, maline, il joue sur les mots : à l’abattoir, « Dimanche / Jour du Seigneur / La semaine / Jours des saigneurs », chez lui, « A la maison / Le quotidien / Le ménage à faire / Quand je ne le fais pas / Ça pèse sur mon ménage ». Les citations et références foisonnent. Son récit est une chasse aux trésors, les vers d’Apollinaire succèdent aux écrits de Perec, les chansons de Brel répondent aux paroles de Trenet.

Joseph Ponthus parle de l’usine comme d’une déflagration physique et morale. « L’usine bouleverse mon corps / Mes certitudes / Ce que je croyais savoir du travail et du repos / De la fatigue / De la joie / De l’humanité », puis « Je ne trouve pas le temps d’écrire / Trop de boulot / Trop de fatigue ». Le livre tient de son besoin de vivre, de son besoin de se raccrocher à quelque chose de plus grand, de plus profond, de plus humain. L’écriture est vitale, sans elle il devient cinglé, « piégé par les machines ». La journée, durant ses huit heures de rang sur les lignes de production, il s’entoure d’Apollinaire, de Céline, d’Aragon, de Cendrars, de Dumas… Tous les soirs, l’écriture l’attend, malgré la fatigue et l’épuisement, tel une échappatoire.

Il écrit pour tenir le coup, il écrit pour ne pas oublier. Le décor nocturne, froid, industriel, le bruit des machines, l’odeur des poissons, de la mort, des carcasses de vaches, le rythme des pauses clopes et du café. L’usine c’est aussi la solidarité ouvrière, les grèves : « Mes bras auront tenu / J’espère que la grève tiendra tout autant / En avant Marx ». C’est l’humour, les chansons, les souvenirs des livres, des auteurs. « Je reviens à Barbara / ‘Je ne suis pas poète / Je suis une femme qui chante’ / Se plaisait-elle à répéter / Pas de poésie non plus à l’usine / Nous somme au mieux des gens qui chantons en travaillant ». Par sa plume, Joseph Ponthus décrit une réalité qui peut sembler révolue, celle d’ouvriers tels des machines qui travaillent à la chaîne, méprisés par les petits-chefs.

Antithétique, A la ligne est à la fois individuel et universel. L’autobiographie, témoignage unique, permet ici la description d’une réalité vécue par d’autres. Les citations et allusions littéraires et culturelles remettent l’individu dans un contexte universel, dans une réalité culturelle partagée. L’usine, expérience déshumanisante, n’a pas raison de l’écrivain. Ponthus par sa force et son acharnement à écrire malgré tout, refuse la perte de son humanité.

« Il y a qu’il n’y aura jamais / De / Point final / A la ligne ». Joseph Ponthus termine son récit par ces mots. L’absence de point final, de fin de récit, évoque le travail interminable, répétitif et épuisant de l’usine. On a envie de reprendre le livre, de recommencer, de se replonger dans cette ode poétique.

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Chaînes de valeur mondiales : une nouvelle phase de la mondialisation s’est ouverte

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Après la crise du Covid-19, une transformation des biens échangés

Si les années 1990 et 2000 sont marquées par une forte croissance des échanges commerciaux, la mondialisation connaît une phase de « normalisation » après la crise de 2008 selon Aymeric Lachaux, l’auteur de la note pour la DG Trésor[1]. L’une des raisons de cette normalisation, c’est-à-dire du développement selon un même rythme de la production économique et des échanges commerciaux, tient à la réorientation de la croissance chinoise dès 2010. Pékin a effectivement favorisé le développement de sa production nationale au détriment de la croissance de ses échanges commerciaux avec le reste du monde[2].

La crise du Covid-19 marque bien évidemment une rupture dans les échanges internationaux. Entre décembre 2019 et mai 2020, le volume des échanges de biens a baissé à raison de -14%. Les capacités de consommation des différents pays ont été impactées au même titre que les capacités de production. Des restrictions au commerce mondiale apparaissent également (197 selon l’OMC).

Une différence doit tout de même être soulignée, selon Aymeric Lachaux, entre les effets de la crise du Covid-19 sur l’économie mondiale et ceux de la crise des Subprimes.  La baisse de la production et des échanges mondiaux suivent un même rythme dans le cas de la crise sanitaire tandis que le commerce mondial se rétracte plus largement lors de la crise de 2008.

La reprise économique, notamment le commerce de biens, ne se fait pas attendre et dès décembre 2022 le volume des biens échangés est 7% plus haut que celui d’avant crise (5% pour la production industrielle). Les transformations de l’économie mondiale ne relèvent donc pas de la quantité des biens échangés mais bien de la nature de ces biens.

La reprise post-covid est marquée par un rebond plus important du commerce de biens par rapport au commerce de services. Naturellement, les produits pharmaceutiques, les semi-conducteurs, les métaux et les ordinateurs portables connaissent une croissance importante des échanges mondiaux tandis que le tourisme ou encore les matériels de transports éprouvent des difficultés à retrouver leur niveau d’avant-crise (expliquant en partie la hausse des prix du fret).

A la faveur de la reprise post-Covid, la Chine a vu son excédent commercial augmenter entre 2021 et 2022. A contrario, le déficit commercial des pays de l’Union européenne vis-à-vis de Pékin s’est creusé. En 2022, celui-ci atteint un niveau record de 390 milliards d’euros.

En raison d’une fin de première vague de covid plus précoce dans l’Empire du milieu que dans d’autres régions du monde, les exportations chinoises retrouvent un niveau élevé dès avril 2020 tandis que les exportations européennes et américaines chutent[3].

Cette hausse des exportations chinoises post-covid explique qu’il n’y ait pas de raccourcissement des chaînes d’approvisionnement. La géographie des échanges et les distances parcourues par les biens importés évoluent peu. Cette faible évolution reflète d’ailleurs selon Aymeric Lachaux le ralentissement de la mondialisation des échanges. Le commerce mondial, y compris dans un contexte de crise sanitaire internationale, emprunte les mêmes routes, à défaut d’en trouver de nouvelles.   

La dépendance accrue des chaînes de valeur aux tensions géopolitiques

L’un des premiers facteurs de réorganisation des échanges mondiaux n’est autre que l’invasion russe de l’Ukraine. Si le volume de marchandises échangées continue d’augmenter en 2022 (+3,5%), les échanges commerciaux se structurent différemment.

Du fait des sanctions économiques et commerciales des pays alliés de l’Ukraine, la Russie a vu ses exportations vers l’Europe, le Japon et les Etats-Unis baisser de 80% et ses importations depuis ces pays diminuer de 47%. A l’inverse, ses échanges avec les pays émergents croissent tout particulièrement. Ces derniers sont multipliés par 5 avec l’Inde et augmentent de 75% avec la Chine. Cependant, la valeur globale des échanges russes avec le reste du monde chute de 27%

Néanmoins la situation à la frontière russo-ukrainienne n’est pas le seul facteur de transformation des chaînes de valeur mondiales. Les tensions commerciales s’exacerbent et les échanges économiques constituent de plus en plus un instrument de pression politique entre pays. La note de la DG Trésor fait notamment mention des mesures de rétorsions chinoises frappant les exportations lituaniennes, et les exportations de produits européens contenant des intrants lituaniens, à la suite du rapprochement diplomatique entre Taïwan et la Lituanie.

Il faut également rappeler les mesures protectionnistes prises par les deux géants dans la guerre économique et commerciale qui les opposent. Si l’administration Biden a considérablement durci les conditions d’accès des entreprises chinoises aux technologies américaines avancées, la Chine n’a pas tardé à lui répondre. Après avoir fortement conditionné l’exportation de deux métaux stratégiques (gallium et germanium) à l’autorisation du pouvoir central, Pékin a franchi un cap supplémentaire dans la guerre commerciale qui l’oppose aux Etats-Unis en stoppant l’exportation de technologies permettant l’extraction et la séparation des terres rares[4].

Quant à l’OMC, elle est désormais considérée par certains acteurs économiques comme une coquille vide dans la mesure où les Etats-Unis et la Chine prennent des décisions en dehors de cette institution depuis plusieurs années.

La sécurisation des approvisionnements : un enjeu crucial pour les entreprises  

Selon la note de la DG Trésor, la montée des tensions géopolitiques et par conséquent des incertitudes quant à l’approvisionnement en matières premières ou produits mondialisés pourrait inciter les entreprises à diversifier leurs chaînes de valeur et à « privilégier des pays plus alignés politiquement plus stables économiquement ou plus proches géographiquement que par le passé ». Le constat est donc relativement proche de celui de Pascal Lorot dans son ouvrage « Le choc des souverainetés » analysé dans l’article suivant :

https://letempsdesruptures.fr/index.php/2024/01/18/le-choc-des-souverainetes-nouvel-horizon-du-xxie-siecle/

Ces modifications n’interviennent en revanche que lorsque les entreprises anticipent des chocs pouvant avoir des répercussions durables sur leur activité économique. Délocaliser une partie de l’appareil productif ou modifier la chaîne d’approvisionnement entraînent effectivement des coûts significatifs.

Au-delà de ces coûts, la modification d’une partie de la chaîne d’approvisionnement peut avoir des répercussions importantes sur les autres maillons de la chaîne (compatibilité entre les différents éléments, rythme de production etc…)

Quelle place pour les pouvoirs publics dans la sécurisation des chaînes d’approvisionnement ?

Face à cette augmentation des risques en matière d’approvisionnement et aux enjeux de sécurisation des chaînes de valeur, les pouvoirs publics peuvent intervenir selon deux modalités complémentaires : l’incitation (subventions et réduction de droits de douane par exemple) et la contrainte (hausse des droits de douane, filtrage des investissements, etc…).

Dans la période post-covid, les mesures visant à favoriser la production nationale (soutien des marques made in France notamment) ou dans les pays proches géographiquement ou politiquement se sont effectivement accrues. Elles visent principalement les matières et produits nécessaires aux transitions écologique et numérique de l’économie. A l’image de l’Inflation Reduction Act aux Etats-Unis ou du Critical Raw Materials Act dans l’UE.

La sécurisation des approvisionnements en métaux stratégiques se fait d’autant plus urgente que selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la demande mondiale en technologies à faible émission carbone pourrait être multipliée par 7 d’ici 2040 en raison notamment de la croissance de la production de véhicules électriques et d’éoliennes offshore (soit 2 millions de tonnes par an contre 280 000 tonnes en 2022).

Peu à peu certaines chaînes de valeur auparavant très concentrées commencent à se diversifier. A l’image du secteur des semi-conducteurs (dont la production est encore aujourd’hui majoritairement assurée par Taïwan et la Corée du Sud) qui connaît désormais des investissements massifs dans les capacités de production japonaises, américaines ou encore européennes.

Néanmoins un travail important d’acculturation des dirigeants économiques, notamment français et européens, aux enjeux de vulnérabilité des chaînes d’approvisionnement des entreprises reste à faire.

On regrette à ce titre que la note de la DG Trésor ne fasse pas mention des différentes stratégies d’acteur sur ces enjeux. Si Pékin, à travers la fusion des intérêts militaro-civiles, les nouvelles routes de la soie, la route de la soie numérique, l’initiative pour la sécurité mondiale et la stratégie de circulation duale, déploie une stratégie redoutable de sécurisation de ses approvisionnements et de ses débouchés économiques il n’en est pas de même de l’Union européenne.

Certes la Commission européenne et le Parlement européen commencent à s’emparer du sujet de la sécurité économique des Etats-membres (voir à ce sujet l’article : Guerre commerciale et technologique : L’UE avance sur sa stratégie de sécurité économique – Le Temps des Ruptures) mais le chemin reste encore long. Au-delà de l’approvisionnement en métaux stratégiques, la dépendance de certains pays de l’UE en matière d’infrastructures est, à bien des égards, alarmante : 100 % du réseau RAN 5G de Chypre est composé d’équipements chinois, le chiffre est de 59 % pour l’Allemagne.

 

Le difficile verdissement des chaînes d’approvisionnement

Au-delà des tensions géopolitiques un autre événement majeur a d’ores et déjà des conséquences sur les chaînes d’approvisionnement mondial : la crise climatique. A ce titre, nombre de productions agricoles vont être touchées par le réchauffement climatique et la forte dépendance de certains territoires aux importations de denrées alimentaires accentue considérablement les risques de crise agricole.

Certes quelques instruments commencent à voir le jour afin de « verdir » les chaînes de valeur mondiales. A ce titre, l’UE compte exercer son pouvoir normatif à travers des outils tels que le Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF) qui soumet les produits importés à la même tarification carbone que les produits européens. Mais les manifestations actuelles d’agriculteurs européens, et notamment français, face à l’augmentation des normes environnementales sur les productions agricoles européennes et l’importation de produits extra-européens hors normes pose la question de la cohérence des politiques publiques menées en la matière.

Références

[1] https://www.tresor.economie.gouv.fr/Articles/10b15671-f665-448d-8a3e-070b5696fb69/files/d008115f-8432-41b8-8089-bf684ef47c83

[2] L’augmentation de sa production s’est donc révélée plus forte sur la période 2010-2019 que l’augmentation de ses échanges.

[3] A noter néanmoins que les exportations baissent au cours du second trimestre 2022 en raison du renforcement des politiques zéro-covid.

[4] Loin d’être anodines, ces deux annonces auront des répercussions importantes sur le marché mondial.  Le gallium (dont les ressources sont détenues à 94% par la Chine) est un élément indispensable pour le développement des technologies LED, des panneaux photovoltaïques et des circuits intégrés. Le germanium (dont 83% de la production mondiale est assurée par la Chine), est incontournable pour les fibres optiques et l’infrarouge. Quant aux technologies d’extraction et de séparation des terres rares, l’interdiction de leur exportation vise surtout à retarder le développement des Etats-Unis dans ce secteur.

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Pékin condamne les mesures européennes en matière de sécurité économique

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Fin janvier les commissaires européens à la Concurrence et au Commerce, Margrethe Vestager et Valdis Dombrovskis ont annoncé la mise en œuvre des plans relatifs au renforcement de la sécurité économique de l’UE face à l’influence grandissante de la Chine dans les économies des Etats membres.

Parmi les mesures énumérées par les deux commissaires européens se trouve le renforcement des mécanismes de contrôle des investissements directs étrangers (IDE). Si l’Union ne dispose pas de compétence propre sur le filtrage des IDE, elle entend inciter les Etats-Membres à se doter d’un arsenal législatif en la matière.

Principal concerné par ces mesures, Pékin, par l’intermédiaire du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, a affirmé que « L’image de l’UE dans les secteurs de l’économie et du commerce international est en jeu ». Toujours selon le porte-parole, cité dans la Tribune[1], « La communauté internationale est très inquiète de l’unilatéralisme protectionniste de l’UE dans les secteurs économique et commercial, […] les tendances actuelles ne vont faire qu’intensifier ces inquiétudes. Nous espérons que l’UE respectera le libre-échange, la libre-concurrence et la coopération ouverte, qui sont des normes fondamentales de l’économie de marché ».  

Les annonces de Margrethe Vestager et Valdis Dombrovskis font écho aux préoccupations déjà affichées par certains parlementaires européens qui dénonçaient, dans un rapport publié en décembre 2023, l’influence croissante de la Chine sur un certain nombre d’infrastructures critiques au sein de l’Union (transports, ports, réseaux télécoms, métaux rares, câbles sous-marins…).

Références

[1] https://www.latribune.fr/economie/union-europeenne/commerce-apres-l-annonce-de-nouvelles-mesures-de-protection-europeennes-la-chine-augmente-la-pression-sur-l-ue-988741.html

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Eolien offshore : l’ambition européenne face au défi industriel et technologique

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Un secteur qui connaît quelques améliorations après une année difficile

Si l’année 2022 s’est révélée difficile pour le secteur de l’éolien offshore (des investissements globaux en chute, des taux d’intérêts élevés et une augmentation du prix des matériaux déstabilisant le marché) 2023 a offert des perspectives plus réjouissantes.

De nouvelles installations ont effectivement été annoncées en 2023 : au Pays-Bas où le «Hollandse Kust Zuid» d’1,5 GW est désormais le plus grand du monde, en Grande-Bretagne mais également en France. Selon le Figaro(1), 30 milliards d’euros de projets ont été validés, des montants records permettant l’émergence de huit fermes. Les différents gouvernements européens ont également annoncé la création de nouvelles usines en Pologne, Allemagne, Espagne, Pays-Bas et Danemark. 

Des échecs significatifs ternissent néanmoins le tableau : en septembre 2023, le Royaume-Uni, qui ambitionne de devenir « l’Arabie Saoudite du vent » et occupe le premier rang mondial en matière de production de turbines en mer, a annoncé n’avoir reçu aucune candidature à son cinquième appel d’offres pour l’attribution de site d’éoliennes offshores. L’entreprise danoise Orsted a quant à elle déprécié ses actifs à hauteur de 2,3 milliards d’euros et s’est retirée de certains projets aux Etats-Unis.

Néanmoins le panorama global reste encourageant : la même entreprise danoise a annoncé fin 2023 investir dans le plus grand parc éolien offshore du monde, Hornsea, au large des îles britanniques, dont la capacité de 2,9GW devrait être atteinte pour 2027.  Et si l’électricien suédois Vattenfall a suspendu sa participation au projet britannique Norfolk Boreas en raison de l’augmentation importante des coûts, RWE a racheté son portefeuille avec pour ambition de relancer le projet.

Des objectifs européens ambitieux à horizon 2050

Afin de soutenir la dynamique du secteur, la Commission européenne a publié son plan 2020 pour les énergies en mer. Ce plan fixe comme objectif d’atteindre 60 gigawatts en 2030 et 300 GW d’ici 2050. Il a en revanche été vite supplanté par un nouveau plan de développement du réseau offshore rendu public le 23 janvier dernier par le Réseau européen des gestionnaires de réseaux de transport d’électricité (REGRT-E). Celui-ci prévoit une production d’énergies renouvelables en mer de 354GW en 2050 (496 en ajoutant la Norvège et le Royaume-Uni)(2).

Un défi immense attend néanmoins les Etats européens : la circulation de l’énergie produite en mer jusqu’au consommateur final. Et pour relever ce défi il ne faut pas moins de 400 milliards d’euros d’investissements selon le REGRT-E. Les infrastructures nécessaires pour assurer cette circulation pourrait « couvrir jusqu’à 54 000 km de lignes dans les eaux européennes, soit près de 1,5 fois la longueur de l’équateur »(3).

Si les conditions de réussites sont en partie financières, elles sont tout autant technologiques. Les technologies actuelles ne permettent pas un niveau de sécurité suffisant dans le cadre d’un projet ambitieux de développement de l’éolien offshore. Ce qu’il manque en priorité ce sont des disjoncteurs DC (courant continu) dont la fabrication demande un savoir-faire technique important et empêche actuellement une production industrielle.

« Si nous voulons […] davantage de parcs éoliens offshore connectés à la terre, nous ne pouvons pas le faire avec les technologies actuelles, car en cas de défaillance, toute la structure s’effondre », a expliqué Gerald Kaendler, président du comité de développement des systèmes au REGRT-E, cité par Euractiv.

En faisant l’hypothèse d’une production industrielle de ces disjoncteurs DC, la capacité d’interconnexion supplémentaire entre les pays de l’Union européenne d’ici 2040 est de 13GW. Sans ces disjoncteurs, cette capacité est ramenée à 7,5GW. Concernant l’Hexagone, dans la première hypothèse les capacités sont également estimées à 13GW et dans la seconde à seulement 2GW.

Au-delà des disjoncteurs DC c’est tout un écosystème industriel qui est nécessaire à la réalisation des ambitions européennes en matière d’éolien offshore : les chantiers navals, les navires, les ports pour l’assemblage et l’installation d’équipements, les ressources humaines « pour concevoir, construire et exploiter les systèmes offshore »(4).

Au même titre que les métaux stratégiques, les matières premières servant à la construction des infrastructures font l’objet d’une concurrence internationale accrue. Le développement de l’éolien n’est pas une exception européenne mais bien un impératif pour nombre de pays en voie de transition énergétique.  Le secteur est d’ailleurs toujours dominé par la Chine et pose la question fondamentale de la dépendance européenne et française aux productions chinoises.

La coordination entre Etats doit elle aussi atteindre un niveau sans précédent dans la mesure où les parcs éoliens offshore relient souvent plusieurs pays. Un premier pas en ce sens a été réalisé par la Commission européenne. Elle a en effet publié un plan d’action dont l’objectif est d’accélérer « le déploiement des réseaux électriques et éliminer les obstacles qui entravent le déploiement des énergies renouvelables ». Reste encore des contraintes difficiles à contourner : celles des règles européennes relatives à la concurrence et remettant en cause la possibilité de former des alliances industrielles conséquentes.

Références

(1)https://www.lefigaro.fr/flash-eco/eolien-offshore-le-secteur-redresse-la-tete-en-europe-20240118

(2) https://www.euractiv.fr/section/energie-climat/news/reseaux-eoliens-offshore-400-milliards-deuros-seraient-necessaires-pour-atteindre-les-objectifs-de-2050/

(3)Idem

(4)Idem

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Guerre commerciale et technologique : L’UE avance sur sa stratégie de sécurité économique

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Cette publication s’inscrit dans le cadre de la réduction des risques diplomatiques et économiques encourus par l’UE dans sa relation avec la Chine annoncée dès mars 2023 par Ursula Von Der Leyen avant sa visite à Pékin avec Emmanuel Macron.

L’une des principales mesures concerne le renforcement du contrôle des investissements directs étrangers (IDE) dans l’UE. La Commission européenne souhaite effectivement établir des critères minimaux de contrôle que chaque Etat-membre devrait mettre en œuvre afin de disposer d’un cadre commun de filtrage.

Si certains Etats-membres ne disposent pas pour le moment de tels mécanismes de contrôle, la France, avec le décret Montebourg entré en vigueur en 2014, a su mettre en place des mesures de protection de ses intérêts stratégiques non pas seulement dans l’industrie de défense mais également dans les domaines de l’eau, de la santé, de l’énergie, des transports et des télécommunications.

Fin 2023, le ministre de l’Économie Bruno le Maire a par ailleurs confirmé la baisse annuelle du seuil de contrôle des IDE de 25% à 10% et l’élargissement du contrôle aux activités d’extraction et de transformation des matières premières critiques.

Au-delà des IDE, le paquet sur la sécurité économique vise également à un contrôle plus efficace de l’UE sur les exportations de biens à « double usage » (usage civil et usage militaire) et à un renforcement de la sécurité économique en matière de recherche. Certaines technologies sont particulièrement ciblées par la Commission : les semi-conducteurs, l’industrie quantique, les biotechnologies ainsi que l’intelligence artificielle.

Cette publication du 24 janvier fait écho aux préoccupations déjà affichées par certains parlementaires européens qui dénonçaient dans un rapport publié en décembre 2023, l’influence croissante de la Chine sur un certain nombre d’infrastructures critiques au sein de l’Union (transports, ports, réseaux télécoms, métaux rares, câbles sous-marins…).

Si la Chine est particulièrement visée par ces récentes décisions de la Commission européenne en raison de sa stratégie de fusion militaro-civile (c’est-à-dire d’alignement des intérêts commerciaux des entreprises privées chinoises sur les intérêts politico-militaires du PCC), elle n’est pas le seul pays déployant des techniques d’ingérence au sein de l’UE. Loin de là.

Les Etats-Unis, au-delà de l’exemple emblématique Alstom, ont également fait pression sur les Pays-Bas en 2023 pour que ces derniers réduisent leurs ventes de semi-conducteurs avancés à Pékin, forçant Amsterdam à se positionner dans la guerre commerciale qui oppose les deux empires.

 

Cette publication s’inscrit dans le cadre de la réduction des risques diplomatiques et économiques encourus par l’UE dans sa relation avec la Chine annoncée dès mars 2023 par Ursula Von Der Leyen avant sa visite à Pékin avec Emmanuel Macron.

L’une des principales mesures concerne le renforcement du contrôle des investissements directs étrangers (IDE) dans l’UE. La Commission européenne souhaite effectivement établir des critères minimaux de contrôle que chaque Etat-membre devrait mettre en œuvre afin de disposer d’un cadre commun de filtrage.

Si certains Etats-membres ne disposent pas pour le moment de tels mécanismes de contrôle, la France, avec le décret Montebourg entré en vigueur en 2014, a su mettre en place des mesures de protection de ses intérêts stratégiques non pas seulement dans l’industrie de défense mais également dans les domaines de l’eau, de la santé, de l’énergie, des transports et des télécommunications.

Fin 2023, le ministre de l’Économie Bruno le Maire a par ailleurs confirmé la baisse annuelle du seuil de contrôle des IDE de 25% à 10% et l’élargissement du contrôle aux activités d’extraction et de transformation des matières premières critiques.

Au-delà des IDE, le paquet sur la sécurité économique vise également à un contrôle plus efficace de l’UE sur les exportations de biens à « double usage » (usage civil et usage militaire) et à un renforcement de la sécurité économique en matière de recherche. Certaines technologies sont particulièrement ciblées par la Commission : les semi-conducteurs, l’industrie quantique, les biotechnologies ainsi que l’intelligence artificielle.

Cette publication du 24 janvier fait écho aux préoccupations déjà affichées par certains parlementaires européens qui dénonçaient dans un rapport publié en décembre 2023, l’influence croissante de la Chine sur un certain nombre d’infrastructures critiques au sein de l’Union (transports, ports, réseaux télécoms, métaux rares, câbles sous-marins…).

Si la Chine est particulièrement visée par ces récentes décisions de la Commission européenne en raison de sa stratégie de fusion militaro-civile (c’est-à-dire d’alignement des intérêts commerciaux des entreprises privées chinoises sur les intérêts politico-militaires du PCC), elle n’est pas le seul pays déployant des techniques d’ingérence au sein de l’UE. Loin de là.

Les Etats-Unis, au-delà de l’exemple emblématique Alstom, ont également fait pression sur les Pays-Bas en 2023 pour que ces derniers réduisent leurs ventes de semi-conducteurs avancés à Pékin, forçant Amsterdam à se positionner dans la guerre commerciale qui oppose les deux empires.

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Pourquoi la gauche doit s’intéresser à la natalité

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Lors d’une conférence de presse le 16 janvier 2024, le Président de la République a parlé de « réarmement civique et démographique » pour souligner sa volonté politique de s’attaquer à la baisse de la natalité et à l’augmentation de l’infertilité en France. Cela a fortement fait réagir, notamment les milieux féministes, accusant Emmanuel Macron de vouloir contrôler le corps des femmes et lui enjoignant de, je cite, « laisser nos utérus en paix(1) ». Comment expliquer que le politique veuille se mêler de ce sujet, qui ne relève en apparence, que de la sphère privée et du droit des femmes à disposer de leur corps ? Est-ce que cet intérêt est vraiment nouveau ? Pas tellement. Depuis 1932, les mesures autour de la famille se sont enchaînées(2), signe de l’intérêt du politique sur cette question cruciale, aux multiples enjeux, pour certains avec des conséquences importantes sur notre société. Le présent article a pour objectif d’en présenter quelques-uns, pour faire prendre conscience, notamment à la gauche, que ce sujet ne doit pas être laissé aux autres partis politiques.

La démographie : critère de puissance dans un contexte géopolitique complexe

Avoir un enfant est un bouleversement des habitudes et des modes de vie, du foyer, du porte-monnaie mais également du corps des femmes. Pour autant, il est impossible de resteindre ce sujet à la seule sphère privé. Et c’est la principale information à retenir de l’allocution du président de la République. 

Une natalité dynamique et une population jeune, permet à un pays d’accroître son influence : à travers sa main d’œuvre pour faire prospérer ses industries, sa diaspora, ou encore, dans un contexte géopolitique à risque et de potentiel déclenchement de conflits, de disposer de soldats. Dans ce contexte, l’utilisation du mot « réarmement » et du vocabulaire militaire, prend tout son sens. Ce terme semble avoir été utilisé sciemment, la communication du président étant toujours pensée au mot près.  

A noter que les puissances émergentes d’Asie, possèdent l’avantage de disposer d’une démographie importante, en forte croissance, même si cette dynamique pourrait s’endiguer dans les prochaines décennies : on compte aujourd’hui 1,15 enfant par femme en Chine en 2022, loin du seuil de renouvellement démographique établi à 2,1 enfants par femme(3).

A l’inverse, les pays de l’OCDE, et pas uniquement la France, sont confrontés à une baisse de la natalité depuis plusieurs décennies. Ainsi, au sein de l’Union européenne en 2023, on compte 1,50 enfant par femme, alors qu’on en comptait 1,57 en 2010(4). Cette baisse est légère, mais progressive. La France reste le pays de l’Union avec le nombre d’enfants par femme le plus élevé : environ 1,83, contre par exemple 1,53 en Allemagne(5). On constate également depuis plusieurs années, après des mouvements de baisse, une augmentation de la fécondité des pays de l’Europe de l’Est (par exemple la Hongrie, la Roumanie, etc.) alors que celle des pays de l’Ouest (France, Allemagne, Espagne, etc.) si elle ne recule pas, stagne.

Les pays de l’Europe de l’Est vont bientôt détrôner la France et afficher le taux d’enfant par femme le plus élevé d’Europe : on pense notamment à la Roumanie, qui comptabilise aujourd’hui 1,80 enfant par femme.

Emmanuel Macron a-t-il peur que cela puisse influencer le rapport de force en Europe ? En effet, la baisse de la natalité, et donc le vieillissement d’une population, réduit fortement une population active. Ainsi, un pays dispose de moins de ressources mobilisables pour la production économique, ou pour le financement du modèle social. Il serait possible d’imaginer dans le futur que la relocalisation en Europe de grandes industries (encouragées par la hausse des tensions au niveau mondial et donc la mise en péril des chaînes d’approvisionnement) soit davantage favorables à des pays comme ceux de l’Est dont la population active est jeune, en plus de disposer de salaires beaucoup plus faibles. 

Ventant la concurrence et l’augmentation à l’extrême de la compétitivité, on peut imaginer que l’Union laissera faire, puisqu’elle ne transige déjà par sur le dumping social. Ces questions sont d’autant plus cruciales aujourd’hui, alors que l’Union imagine intégrer de nouveaux pays à l’Est.

Le politique a-t-il peur d’une transformation de la société française ?

Au-delà de l’infertilité croissante dont parle le Président (sur laquelle nous reviendrons), il évoque également l’évolution des mœurs dans son discours. Emmanuel Macron indique que les femmes font des enfants de plus en plus tard. En effet, alors qu’en 1994, l’âge moyen de la mère à l’accouchement était de 28,8 ans, il est en 2023 d’environ 31 ans(6)

Mais prend-il réellement conscience de ces évolutions ? En évoquant sa volonté de faire remonter la natalité en France, il semble, de manière sous-jacente, se positionner en faveur du modèle de la famille « nucléaire », étant le cadre le plus classique pour avoir des enfants, sans prendre en compte que de nombreuses autres formes de couple / de vie ont émergé ces dernières décennies. Loin de se montrer progressiste en la matière, il semble plutôt droitiser son discours (ce n’est d’ailleurs pas spécifique au sujet de la famille et de la natalité).

Le président de la République semble également ne pas totalement comprendre, (en tout cas il ne se prononce pas sur le sujet) les raisons pour lesquelles les femmes ont des enfants plus tard, voire n’en ont tout simplement pas. La thèse de Véra Nikolski nous donne des pistes de réflexion : l’autrice met en relation la baisse de la natalité, avec l’augmentation de l’indépendance des femmes. Elle estime que l’émancipation des femmes a été obtenue grâce au progrès technique et scientifique. En raison en effet des évolutions scientifiques, le taux de mortalité infantile a baissé drastiquement, permettant aux femmes d’être rassurées quant à leur survie et à celle de leur progéniture : cela semble aller de soi aujourd’hui, ce n’était pas le cas il y a encore quelques décennies. L’émancipation des femmes a été rendue possible en raison également d’un autre facteur : faisant moins d’enfants elles passent moins de temps enceinte ou à s’occuper de leurs enfants qu’auparavant, et bénéficient par conséquent de plus d’autonomie et de liberté. Il est à craindre que, lorsque la nation a besoin que les femmes se mettent à son service, pour réarmer démographiquement le pays, il en soit fini de leurs droits. 

Des considérations culturelles voire anthropologiques tendent également à expliquer la baisse du taux de natalité : être une femme dans nos sociétés contemporaines ne passe plus obligatoirement par l’enfantement. Être mère ne se conçoit plus de la même manière qu’auparavant. Demander simplement aux femmes de « réarmer » la France, n’aura certainement pas l’effet escompté.

D’autres facteurs, bien qu’encore très marginaux, peuvent également jouer sur la baisse de la natalité de certaines catégories de la population française. L’éco-anxiété en est un et touche de plus en plus de femmes et de couples. Comment imaginer avoir un enfant dans un monde en plein basculement climatique ? L’absence d’une politique d’envergure pour aborder la transition écologique, en France comme au niveau européen et mondial, ne permet pas de se projeter.

Bien sûr la baisse de la natalité est une donnée à ne pas prendre à la légère. Elle risque d’avoir des répercussions importantes sur la société française. Son corrolaire, le vieillissement de la population (qui touche massivement les pays de l’OCDE), risque de transformer notre modèle de société  : comment pérenniser notre modèle social avec la réduction de la population active et l’allongement de l’espérance de vie ? Comment prendre en charge correctement le grand âge, d’autant plus si le nombre de personnes âgées augmente ? Le système est d’ailleurs déjà défaillant, comme ont pu le démontrer les scandales et enquêtes sur la gestion de nombreux EHPAD en France, cherchant la rentabilité plutôt que le bien-être des pensionnaires. Des questions qui restent sans réponse et qui ne sont que trop partiellement abordées.

L’infertilité, LE tabou du siècle selon Emmanuel Macron

Dans son discours, Emmanuel Macron indique qu’il souhaite la mise en œuvre d’un plan pour lutter contre l’infertilité. Les contours de ce plan, restent flous. Il faut effectivement reconnaître que c’est un problème au niveau mondial : selon un rapport de l’OMS, 17,5% de la population en âge d’avoir des enfants est touché par l’infertilité et une personne sur six a déjà rencontré des problèmes d’infertilité dans sa vie(7).

Quelles sont les raisons principales de l’infertilité ? Plusieurs sont connues de la communauté scientifique : les perturbateurs endocriniens et pesticides, que nous consommons, que nous ingérons ou que notre peau absorbe dans les produits alimentaires mais également d’hygiène et de beauté ;  la pollution atmosphérique….On peut également citer certaines pathologies, comme l’endométriose qui peut avoir des conséquences importantes sur le quotidien et la fertilité des femmes ou encore, les maladies sexuellement transmissibles non-traitées comme la chlamydia. Concernant l’endométriose, bien que les recherches (qui progressent) n’aient pas encore permis de déterminer précisément les causes de cette pathologie, notre mode de vie en est potentiellement une des explications.

Cet étalage n’a pas pour objectif d’être exhaustif ou de faire peur : l’idée est de démontrer que l’infertilité est un sujet global, avec de multiples causes, dont l’augmentation relève surtout de notre façon de vivre et de notre modèle de société.

Il semble difficile de concevoir un plan de lutte contre l’infertilité qui soit réellement à la hauteur : pour l’être, cela nécessiterait de repenser complètement notre modèle. Et les plans européens (la PAC qui n’encourage pas spécialement la fin de l’utilisation des pesticides ni la fin de l’agriculture intensive ; le plan « fit for 55 » qui est censé réduire d’au moins 55% d’ici 2030 les émissions nettes de gaz à effet de serre, notamment dans les transports, sans qu’on puisse à ce stade constater des effets, etc.), semblent encore n’avoir que des conséquences réduites en la matière. Sans s’occuper des raisons profondes de l’infertilité, ce plan ne sera rien d’autre qu’une mesurette.

Redonner confiance en l’avenir

Concernant l’accompagnement de la parentalité, on peut déplorer l’absence d’infrastructures suffisantes pour accueillir les jeunes enfants, à des prix raisonnables. Si le président de la République souhaite encourager les femmes à avoir des enfants, il faudrait qu’il s’attaque sérieusement à cette question.

Au-delà des structures, Emmanuel Macron a annoncé vouloir remplacer le congé parental par le congé de naissance, d’une durée plus courte (6 mois) mais avec une rémunération a priori plus importante. Cela fait plusieurs mois que le gouvernement évoque cette mesure, sans qu’on en connaisse les contours. Augmenter la rémunération de ce congé est nécessaire, mais il y a d’autres paramètres à prendre en compte : ce congé pourra-t ’il être pris de manière désynchronisée ? Quelle sera sa rémunération exacte ? Comment pourra-t-il s’articuler avec le congé maternité et paternité ? Sera-t-il contraignant, notamment pour établir l’égalité dans la prise en charge de l’éducation par les deux parents ? Tout cela reste encore flou.

Ces aspects sont d’autant plus importants à prendre en compte que la maternité est un facteur pénalisant dans la carrière des femmes, et source, en partie, d’inégalités salariales qui persistent.

Il ne suffit pas de vouloir faire le buzz en employant un terme militaire pour évoquer le sujet de la natalité. Cette question s’inscrit dans un cadre plus large, et soulève de réelles interrogations pour l’avenir. La natalité est en baisse en France, mais cela est un mouvement global rencontré par de nombreux pays, notamment de l’OCDE. L’émancipation des femmes et l’acquisition de nouveaux droits, peut l’expliquer en partie, et c’est une bonne chose : les femmes ont la liberté de choisir d’avoir des enfants ou non, et si elles le souhaitent, quand et comment. La baisse de la natalité ne pourra pas être endiguée sans repenser réellement notre mode de vie. C’est bien notre modèle qui est à remettre en cause, mais il y a peu de chance que le gouvernement et l’Union européenne, prennent ce chemin.

Ce discours, est en complète opposition avec l’ère du temps : l’atteinte effective de l’égalité entre les femmes et les hommes dans tous les domaines, et la transition écologique. Pour autant, la natalité reste un sujet d’ampleur, dont la gauche doit se saisir, au regard de tous les enjeux qu’il comporte.  

Références

(1)Propos tenus par Anne-Cécile Mailfert, Présidente de la Fondation des Femmes, sur les plateaux télé et sur X

(2)https://www.vie-publique.fr/eclairage/20144-la-politique-de-la-famille-depuis-1932-chronologie

(3)https://www.geo.fr/geopolitique/face-a-son-declin-demographique-la-chine-risque-une-crise-sans-precedent-214800

(4) https://www.ined.fr/fr/tout-savoirpopulation/chiffres/europe-pays-developpes/indicateurs-fecondite/

(5) Eurostats

(6)https://www.insee.fr/fr/statistiques/2381390

(7)https://www.who.int/publications/i/item/978920068

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