JIM WATSON/AFP via Getty Images
Les campagnes de Donald Trump et de Kamala Harris sont elles révolutionnaire ? Je ne le pense pas.
Renversent-elles la table, bousculent-elles fondamentalement les codes ? Je ne le pense pas non plus, du moins, si l’on ne fantasme pas sur Elon Musk.
Mais il y a déjà deux grands gagnants dans cette campagne — et ce n’est pas forcément une bonne nouvelle : d’abord, le réseau social X, qui prouve, malgré ses 18 ans d’existence, que les journalistes et la sphère médiatico-politique n’arrivent toujours pas à s’en défaire, comme un vieux Chewing-gum collé à une semelle.
→ Et vraiment, il va falloir que cela change !
Deuxième gagnant, Elon Musk, qui rafle tout. Entre autopromotion de lui-même et valorisation de ses entreprises à commencer par X bien sûr. C’est un strike. Car s’il l’on parle d’Elon Musk alors bien sûr l’on parle de ses entreprises.
En effet, non seulement le milliardaire à mis son réseau social et ses algorithmes à son entière disposition — il n’y a qu’à voir la surreprésentation de ses publications dans la rubrique “for you” au quotidien dès l’ouverture de l’application (plus encore pour ceux qui le follow), ce qui lui permet d’obtenir une visibilité monstrueuse et sans précédent (10, 20, 30, voire 50 millions d’impressions par posts) — mais il profite également de cette campagne présidentielle 2024 pour faire directement et indirectement la promotion de son réseau social qui n’est autre qu’une plateforme privée à but lucratif : comme si demain, Xavier Niel décidait, pendant la campagne présidentielle, d’utiliser le réseau Free et le journal Le Monde pour envoyer tous les jours à ses clients, ses opinions, des clashs, etc.
Elon Musk est allé encore plus loin en proposant 1 million de $ par tirage au sort aux Américains qui soutiennent Donald Trump et vont voter pour lui. Là encore, un nouveau coup du milliardaire plus motivé par la publicité et son autopromotion finalement à moindres frais puisque le monde entier s’est fait le relai de cette information. 1 million / jour pour avoir la visibilité publicitaire d’un Super Bowl, franchement, ce n’est rien du tout ! Ce n’est donc ni de la générosité ni de l’altruisme et probablement encore moins lié à un véritable engagement politique. Non seulement terrifiant, mais, là encore, l’on constate des failles contre lesquelles personne ne semble en mesure de lutter.
43,6 millions : c’est la somme en dollars qu’Elon Musk a ajoutée au financement de la campagne de Donald Trump, rapporte le Monde.
À titre de comparaison, le tarif du spot publicitaire au Super Bowl était d’environ 7 millions de dollars les 30 secondes. 43,6 millions de dollars pour Elon Musk correspondraient à seulement 7 spots publicitaires de 30 secondes… Clairement, cet investissement lui est plus que favorable d’autant qu’une partie non négligeable (la moitié) de l’Amérique est acquise à la cause des républicains : une magnifique audience, une source de business gigantesque.
→ LIRE AUSSI : Elon Musk a transformé X en arme politique
Ainsi, j’en arrive à la grande perdante de cette période de campagne et de cette élection américaine : la démocratie* !
*Forme de gouvernement dans laquelle la souveraineté appartient au peuple ; État ainsi gouverné.
À deux jours d’un scrutin qui s’annonce très serré, le monde entier se voit suspendu à un choix effrayant entre un Donald Trump de plus en plus grotesque, mais nationaliste, et une Kamala Harris qui, malgré ses trois gros défauts (être une femme, une femme de couleur, et être l’héritière de Joe Biden), est, selon moi, la meilleure candidate. D’ailleurs, du point de vue de la communication, je trouve la campagne de Kamala Harris très réussie. Particulièrement sur la tonalité très bien illustrée par la chanson FREEDOM de Beyoncé. Les contenus vidéos, en nombre, ont été savamment calculés et s’accordent parfaitement au storytelling de la campagne de la candidate. Cela mérite un article complet sur le sujet !
Je reviens sur notre triste perdante : la démocratie.
Là encore, je vais parler des deux milliardaires républicains, qui sont tous les deux en plein égotrip. Il y a d’abord la marionnette “Donald Trump” et son manipulateur, notre cher Elon. Deux hommes et des équipes, dont il manque vraisemblablement la case “éthique” dans leur logiciel, sont prêts à se battre pour gagner un pays, à diviser sa population pour la faire s’affronter, annonçant déjà la non-reconnaissance du scrutin et laissant planer le doute d’une nouvelle prise du Capitole. Pour arriver à ses fins, Elon Musk s’est transformé en machine à troll russe et l’on sait à quel point cela fonctionne. N’ayons pas peur de faire le lien avec les méthodes utilisées pour faire monter l’extrême droite et ses valeurs partout dans le monde …
Comme le souligne Matt Navarra , Elon Musk est désormais le plus grand promoteur de complots anti-immigrés de sa plateforme X.
En effet, cette année, l’immigration et la fraude électorale (qui met en danger la démocratie américaine) sont devenues les sujets les plus fréquemment postés par Elon Musk, récoltant un nombre d’impressions absolument gargantuesque de 10 MILLIARDS DE VUES = très inquiétant.
Je ne suis pas certain qu’il soit très utile de prolonger la démonstration sur le cas Trump x Elon tout deux en position d’abus de pouvoir.
Je propose cependant, à celles et ceux que cela intéresse de rédiger un Projet de Loi pour qu’une telle dérive ne puisse se produire en France et, pourquoi pas, en Europe. La lutte contre la désinformation, et celle de réguler le pouvoir du privé sur le public me semblent essentielles. La protection de nos démocraties passe par l’adaptation des règles qui les protègent en fonction des évolutions de la société. Nous avons un cas d’école, tirons-en dès maintenant une bonne leçon.
N’oublions pas qu’il est bon de s’indigner : cela évite de tomber.
Par ailleurs, le danger Bolloré (CNEWS, C8, Fayard, le JDD …) est bien présent en France. je vous invite d’ailleurs à lire le livre suivant : POP fascisme, comment l’extrême droite a gagné la bataille culturelle, Pierre Plotu et Maxime Macé, éditions Divergences, 2024.