Photo : L’Humanité
LTR : Qu’est-ce que l’Europe symbolise et signifie pour vous ? Quelles distinctions apportez-vous entre l’Europe comme concept historique, culturel ou politique, et l’Union européenne en tant qu’institution(s) ? Où s’arrête l’Europe géographiquement ?
L’Europe est avant tout un continent géographique. Je pense qu’il ne faut pas chercher à tout prix une unité et une cohérence européenne là où il n’y en a pas. Quels liens entre Toulouse et Héraklion ou entre Manchester et Sotchi ? Il y a toujours existé des Europes en réalité. Les empires ont divisé ce continent, la guerre froide aussi.
Celles et ceux qui veulent voir un lien entre les peuples d’Europe le font souvent pour servir leur propos. D’un côté les nationalistes, qui cherchent à valoriser des racines judéo-chrétiennes européennes pour exclure. Ce récit politique met volontairement de côté toute une partie de l’histoire de l’Europe et permet de justifier des positions nationalistes et racistes.
De l’autre côté, les libéraux fanatiques de l’euro et particulièrement de l’Union européenne. Il en existe différentes variantes, allant d’Emmanuel Macron et son armée européenne, à EELV et son Europe fédérale, en passant par les socio-libéraux comme Raphaël Glucksmann qui veulent envoyer les Français mourir en Ukraine. Ces gens ont en commun de détester l’Etat-nation et la souveraineté nationale.
LTR : Quel regard portez-vous sur l’histoire de la construction européenne ? Est-ce véritablement une construction démocratique et sociale ?
L’Union européennes a été, est, et sera toujours un outil au service des puissances de l’argent. Elle s’est toujours construite contre les peuples. Un des premiers actes fondateurs de l’Union européenne est la communauté européenne du charbon et de l’acier en 1951. Si son objectif louable était d’empêcher une nouvelle guerre, sa réalisation s’est faite sur des bases libérales en créant un marché unique entre la France, la RFA, l’Italie, la Belgique, le Luxembourg et les Pays-Bas. Directement, les travailleurs de ces pays ont été mis en concurrence, et leurs droits ont été tirés vers le bas.
Il y a eu ensuite les traités de Rome, le traité de Maastricht, le traité de Lisbonne… Le Parti communiste français est le seul parti de gauche à avoir fait campagne contre l’ensemble de ces traités. Depuis sa création, l’Union européenne détruit tout sur son passage et essaie de nous vanter des pseudos réussites. “L’Europe a attaqué nos services publics, mais ne vous inquiétez pas, on a Erasmus. L’Europe a augmenté nos factures EDF, mais ne vous inquiétez pas, on a Erasmus. L’Europe a délocalisé nos usines à l’autre bout du monde, mais ne vous inquiétez pas, on a Erasmus.” disait très justement Léon Deffontaines lors de meeting du 15 mai dernier à Paris.
LTR : A l’heure actuelle, quels sont les principaux dysfonctionnements que vous percevez dans l’Union européenne ? L’Europe peut-elle sortir de sa naïveté économique et géopolitique ?
L’Union européenne est un outil au service de la classe dominante pour pouvoir exploiter toujours plus les travailleuses et les travailleurs européens.
LTR : Quelles sont les mesures à court-terme que proposent vos partis politiques pour réformer l’Europe ? Et quelles sont leurs visions à long terme pour celle-ci ? L’Europe est-elle réformable face aux blocages de certains Etats ?
Il faut tout revoir du sol au plafond, repartir à zéro. Nous voulons détruire cette Union européenne libérale pour bâtir de nouvelles coopérations entre des peuples libres, souverains et associés. Face aux nombreux défis auxquels nous faisons face, nous avons plus que jamais besoin de coopérations. Nous ne serons pas à la hauteur sur le climat, les migrations, les crises sanitaires, le vieillissement de la population, l’égalité femme-homme à construire, si nous essayons de régler ces problèmes uniquement en France.
Des peuples en Europe ne veulent pas d’une Europe basée sur le libéralisme. Nous pouvons construire et impulser de nouvelles coopérations entre ces peuples. L’Irlande, l’Espagne et le Portugal sont par exemple prêts à prendre des initiatives communes pour mettre la pression sur le gouvernement d’extrême-droite israélien. Joignons-nous à eux ! Détruisons cette Europe atlantiste, de la compétition et de la concurrence pour bâtir une Europe de la paix, de l’échange et de la coopération.
Pourquoi ne pas investir ensemble en Europe pour développer la recherche publique sur la santé, notamment les vaccins, pour ne plus reproduire le cirque de la concurrence des laboratoires privés lors de la crise du COVID-19 ? Pourquoi ne pas développer un fonds européen pour financer la formation professionnelle des générations futures pour pouvoir réindustrialiser l’Europe ? Si des pays sont prêts à avancer dans cette voie, faisons-le, avec ou sans l’Union européenne.
LTR : Est-ce que les politiques européennes sont à la hauteur des attentes et des besoins de la jeunesse ?
L’Union européenne brise notre avenir. Alors que nous avons besoin d’avoir la jeunesse la mieux formée possible, la règle des 3% empêche les États d’investir dans l’éducation et pousse à créer des plateformes de sélection comme Parcoursup et MonMaster.
Alors que nous avons besoin de conquérir la dignité au travail, l’Union européenne empêche la création d’emploi en encourageant les délocalisations et en organisant la concurrence entre travailleuses et travailleurs.
Alors que notre génération est sensible aux batailles pour la paix, l’Union européenne est incapable d’être audible en s’incrivant dans une logique de bloc, et s’alignant en permanence sur l’OTAN. Pour la jeunesse, il est urgent de faire mourir cette Europe du passé et bâtir de nouvelles coopérations entre les peuples européens.