Notre société est traversée de multiples clivages. Si la République, par essence, organise la vie commune des citoyens en refusant de promouvoir ou de subventionner une organisation communautariste à l’anglo-saxonne, l’idéal jacobin d’une France une et indivisible paraît amèrement lointain pour quiconque dresse un panorama objectif de la situation.
Pour y répondre politiquement et continuer de défendre un modèle universaliste qui ne soit pas incantatoire, il est primordial d’accepter et de comprendre ces clivages et ces fractures qui nourrissent la rancœur et la division nationale. La promesse universaliste est indubitablement en crise. Entre aversion profonde pour un projet politique parfois incompris et faussaires qui la fantasment, l’universalisme est aujourd’hui malmené dans le débat public. Le personnel politique et intellectuel ne s’accorde pas sur les raisons de cette crise, et le camp social-républicain est traversé par des logiciels de compréhension parfois concurrents. Ces modèles de pensée, dont la plupart méritent d’être compris et entendus, nourrissent une philosophie politique globale qui se détache de l’idéologie dominante en ce qu’elle s’inscrit sur une compréhension fine au long terme d’une société dictée par la vitesse et l’urgence. En première lecture, les analyses de Christophe Guilluy semblent évidentes à celles et ceux dont l’affect est porté sur les classes populaires rurales. Quand aux réflexions d’Emmanuel Todd, elles séduisent davantage en première instance les militants attachés à la défense des quartiers populaires de banlieues. David Goodhart, lui, qui base sa pensée sur la mobilité, apporte une réponse aux néo-populistes mais fait bondir les quelques militants restés sur une doctrine marxiste pure. Pourtant, tous ces référentiels politiques, qui se nourrissent mutuellement et apportent tous des éléments de réponse, ne sont pas antinomiques, et un républicain convaincu ne saurait exercer le pouvoir sans appréhender la société dans sa complexité et les rap- ports de force qui la gouvernent.
Si le projet universaliste est miné par une crise de compréhension de cette ampleur, c’est que la concurrence des grilles de lecture qui le traversent est symptomatique d’un processus à l’œuvre de reconstruction du pôle républicain. Il faut donc reprendre en profondeur les analyses. La reconstruction républicaine ne pourra se faire sans un projet radical qui balaie trente ans d’accords tacites entre néolibéraux de gauche et de droite. Dans une République dont le fonctionnement n’aurait pas été entravé par une bourgeoisie auto-reproductrice et sans idéologie sinon celle du maintien de son pouvoir et de sa puissance, les citoyens et citoyennes vivraient égaux au sein de la Nation, sans que leur genre, leur orientation sexuelle, leur origine ou leur niveau de revenus n’aient à obstruer les droits fondamentaux chèrement acquis lors des épisodes révolutionnaires français, de 1789 à 2005 et encore aujourd’hui lors des soulèvements populaires.
Si les textes de loi organisent objectivement cet idéal universel, la réalité est toute autre, et les inégalités persistent à se frayer un chemin dans le quotidien de bon nombre de citoyens. L’universalisme qui devrait résonner en chacun comme un idéal de vie collective est trop souvent fantasmé par ceux qui s’en réclament, et qui en font une réalité chimiquement pure déjà applicable et appliquée. Ceux-là doivent comprendre que l’universalisme est un projet poli- tique, un horizon vers lequel tendre, et qu’il nécessite d’être défendu de manière raisonnée et raisonnable, sans enfermement idéologique. Ernest Renan définissait la Nation comme un « plébiscite de tous les jours ». La République n’est pas autre chose.
Si ces discriminations sont reproduites de façon systématique, ce n’est pas qu’elles bénéficient nécessairement à une fraction de citoyens qui en opprimerait une autre : elles sont le produit d’un système néolibéral qui s’assied sur la division et la fragmentation. C’est ce phénomène que Christophe Guilluy, dans son dernier ouvrage, nomme la déconstruction. Dans une dynamique somme toute très machiavélienne, il s’agit de donner à voir une société fragmentée, dévitalisée et communautarisée pour se satisfaire d’avancées sociétales cosmétiques et perpétuer l’oppression globalisée néo- libérale. Christophe Guilluy prend l’exemple du « grand débat » : Em- manuel Macron, plutôt que de répondre collectivement à une colère partagée par la grande majorité de la population, pour la première fois retrouvée au sein d’une communauté certes hétérogène mais unie, a préféré panéliser. Un soir, il rencontrait les maires, le lendemain c’était les femmes seules… et évidemment, les banlieues et quartiers populaires n’étaient pas de la partie, histoire d’accentuer d’autant plus leur désertion de la communauté républicaine. S’il y a une classe dominante, position qui semble consensuelle, si ce n’est homogène, du moins unie et animée par des intérêts communs, qui parvient à se maintenir, c’est qu’il existe en face d’elle une classe do- minée. Mais cette fameuse classe dominée, dont le soulèvement provoquerait inexorablement la fin d’un système, semble bien difficile à trouver, surtout depuis que le mode de vie désintellectualisé et individualiste relayé à grands renforts de Brut et de Konbini se répand de manière outrageante. Le géographe dresse le clivage entre des métropoles mondialisées, citadelles qui semblent ouvertes mais qui sont en fait l’outil de relégation à la marge des « gens ordinaires », et la France périphérique, oubliée d’une mondialisation qui l’ignore, et où vit le coeur politique d’un pays en crise, sans cesse assigné à ne pas exister. Dans la pensée de Christophe Guilluy, les banlieues sont rattachées – en termes de dynamiques démographiques et politiques – aux métropoles. Il y a une interdépendance entre les habitants de banlieue, qui bénéficient des infrastructures métropolitaines, et les habitants des métropoles, qui ont besoin de la main d’œuvre populaire pour l’organisation structurelle de leur quotidien.
Pour Emmanuel Todd, le clivage est ailleurs. Dans son dernier ouvrage, il dresse une typologie en quatre strates de la population française. En haut de l’échelle, l’aristocratie stato-financière, les dominants, qui utilisent les outils de l’État pour favoriser le règne de la finance. Juste en dessous, 19% de pseudo-dominants qui sont les alliés objectifs des premiers, sorte de « petite- bourgeoisie-tampon » qui sécurisent le monde étriqué de la classe supérieure. Vient enfin la classe majoritaire, la masse centrale atomisée, clé de voûte selon lui d’un renversement paradigmatique nécessaire. Les 30% d’ouvriers et d’employés non qualifiés, qui com- posent le prolétariat postmoderne, ferment le ban.
Dans « Qui est Charlie, Sociologie d’une crise religieuse », ouvrage sorti après les attentats de janvier 2015, le démographe donne un son de cloche analytique à contre-courant, considérant que les manifestations de soutien à Charlie Hebdo sont le résultat d’une crise religieuse qui traverse la classe moyenne et place à part du reste des dominés les quartiers de banlieue. Il explique que la déchristianisation de la société crée une angoisse à laquelle l’athéisme ne saurait répondre, et il a fallu à la France un bouc émissaire pour combler ce vide, en la personne de la religion musulmane.
Il y a donc selon Emmanuel Todd un clivage qui se dessine très nettement autour de considérations religieuses, notamment parce que l’islam serait devenu « le support moral des immigrés de banlieue dépourvus de travail ». Critiquer l’islam ne serait donc plus user justement de la liberté d’expression prévue par la loi, mais créer une fracture telle qu’elle aboutit à la marginalisation d’une partie de la société, les musulmans. Les personnes musulmanes, concentrées en grande partie dans les quartiers populaires des banlieues, devraient donc être traitées différemment du reste de la population déchristianisée.
Un autre son de cloche est proposé par le journaliste britannique David Goodhart qui, dans son ouvrage Les deux clans, paru en 2019, propose un clivage entre les gens de quelque part (les somewhere) et les gens de n’importe où (les anywhere).
Cette seconde classe, qu’il estime à 25% de la population – en Angleterre en tout cas – est constituée des héros de la mondialisation heureuse. Mobiles, diplômés et intégrés, ils sont progressistes sur les sujets sociétaux, mais s’accommodent tout-à-fait de la globalisation et de l’internationalisation numérique des sujets. Téléphone à la main, souvent en déplacement, ils parlent anglais et savent se mouvoir dans toutes les cultures. Ils célèbrent la diversité, sont pour une immigration décomplexée à laquelle ils ne voient que des avantages, ne comprennent pas le racisme ni le concept de frontières. Ils ne sont attachés à aucun lieu, à aucune identité, et leur surreprésentation dans les médias et les œuvres de fiction leur permet de se complaire dans la croyance qu’ils sont la normalité.
Les gens de quelque part, eux, forment une majorité de la population (50% selon Goodhart, les 25% restant étant selon lui entre les deux), souvent loin des métropoles, attachés à leur identité, à leurs valeurs et réfractaires à l’idée de mondialisation dont ils sont sou- vent les grands perdants. Victimes de la désindustrialisation, ils ont vu concrètement les conséquences économiques du néolibéralisme, qui a appauvri leurs régions et les a relégués à une sous-représentation médiatique telle qu’ils se sentent bafoués dans leur dignité. Ces gens de quelque part sont avant tout guidés par le besoin de survivre économiquement. Ils ne sont, selon Goodhart, ni racistes, ni xénophobes, ni sexistes, malgré les représentations que s’en font les gens de n’importe où.
L’universalisme est un projet politique, un horizon vers lequel tendre.
Ce logiciel de pensée peut sembler très similaire à celui de Christophe Guilluy, et d’ailleurs l’un comme l’autre s’abreuvent souvent dans leurs interventions de références mutuelles. Cependant, la terminologie de David Goodhart laisse plus de place à une troisième partie de la population qui flotterait dans un entre-deux, et propose ainsi une latitude suffisante pour intégrer les habitants des quartiers populaires de banlieue ; ceux-là sont pour beaucoup très attachés à leur identité locale, ainsi que le montrent les résurgences dans la culture populaire de déterminations départementales (les rappeurs, par exemple, font souvent référence aux numéros qui y sont rattachés (92/93/etc.). Ils seraient à la fois « somewhere » car attachés à leur identité et assignés à un lieu de vie unique et « anywhere » car ils sont pour beaucoup issus de l’immigration et en contact avec des cultures diverses qui cohabitent. Une donnée majeure qui explique les différences d’approche entre Goodhart et Guilluy réside dans le fait que là où le premier cherche à rationaliser des clivages via le sens donné, consciemment ou inconsciemment, par les « somewhere » et les « anywhere », à leur place dans la société, le second s’intéresse aux dynamiques objectives. Les habitants de banlieue sont donc des « somewhere » qui, malgré eux, participent au renforcement des métropoles.
En novembre 2018, un mouvement social d’ampleur, sociologiquement très différent des traditionnels défilés, venait bouleverser le jeu politique ; le mouvement des Gilets jaunes a transformé durablement le paysage politique en obligeant le personnel institué à adapter son jeu électoral sur le long terme. Il s’agit dès lors, pour comprendre en profondeur les raisons de ce mouvement et la traduction politique que l’on doit lui apporter, de tenter d’expliquer les causes de son émergence (pas si) soudaine. Il faut a minima remonter au référendum du 29 mai 2005 – bien que la dissociation des citoyens vis-à-vis de leur personnel politique réponde à une trajectoire sourde plus lointaine, ce moment a agi comme un déflagrateur. En trahissant la volonté populaire et en ratifiant unilatéralement le traité de Lisbonne, le président Nicolas Sarkozy a gravé dans le marbre l’indépendance du politique et le renforcement du clivage avec le souverain unique en République qu’est le peuple.
Là, les citoyens de France ont pris acte qu’ils avaient été dépossédés, par la V° République et ses repré- sentants, de leur pouvoir d’action et d’intervention. Le peuple français, profondément politique, héritier des lumières et du contrat social, précurseur de la démocratie, se voyait là réduit à néant par ses gouvernants ; la colère et la crainte de voir le pouvoir se renforcer durement d’années en an- nées, jusqu’à aboutir à un président comme Emmanuel Ma- cron pour qui l’Assemblée nationale n’est qu’une chambre de validation des politiques qu’il mène contre le corps social marquaient déjà les prémisses d’un mouvement extraordinaire. Il faut donner à cette colère, dont l’acmé s’est exprimée lorsque les citoyens ont investi les ronds-points et les Champs-Elysées parés d’habits fluorescents, une lecture politique et théorique en s’inspirant des travaux cités précédemment, pour appréhender dans sa complexité une vague citoyenne inédite.
Les Gilets jaunes, ainsi que l’analyse Christophe Guilluy dans un entre- tien pour la revue Reconstruire, ont été « une sorte d’incarnation de la France périphérique. » Sur les ronds- points, les membres du mouvement retrouvaient une solidarité, une souveraineté réelle dont ils avaient été dépossédés. Cette souverai- neté réelle s’incarnait à plusieurs niveaux.
Dans un premier temps, les Gilets jaunes se réappropriaient leurs cadres de vie et les transformaient en cadres de lutte ; les ronds_points constituent symboliquement et géographiquement l’incarnation d’un carrefour de vie. C’est le lieu de la rencontre, la croisée des chemins : c’est, finalement, le seul lieu où cohabitent toutes les strates de la société sur leurs routes quotidiennes.
Voilà l’âme revendicatrice du mouvement : la volonté de refaire le peuple, de recréer collectivement les cadres révolutionnaires anciens et renouer avec la souveraineté populaire.
Au travers du signifiant vide que constitue le gilet jaune, ces néo-militants envoyaient un message clair : « nous existons. » Mieux : « nous existons de nouveau. » Dans l’une de ses contributions au Manuel indocile de Sciences sociales, Willy Pelletier explique comment les Gilets jaunes, sur les ronds-points, ont retrouvé une estime d’eux mêmes qu’ils avaient abandonné face au mépris des puissants. Il faut comprendre les dynamiques à l’oeuvre : quelles que soient les déterminants exacts de leur oppression, et que l’on croie aux thèses de Guilluy, Todd ou Goodhart ou non, il est évident que les Gilets jaunes partageaient une volonté collective de se faire voir, de remplacer l’illusion du réel dictée par les médias et la parole dominante par un récit sans illusion de la réalité de leur quotidien.
Alors, le rôle du politique est décisif : plutôt que d’encourager ce processus destituant, et de renforcer la défiance du corps citoyen vis-à-vis de ses représentants, ce qui risquerait d’encourager la montée inédite de l’abstention, il s’agit d’incarner cette colère et de la traduire en un mouvement encourageant et positif. Les Gilets jaunes ont incarné une colère réprimée qui leur est largement antérieure. Là où mai 1968 avait été, dans une France prospère en pleine période des « Trente glorieuses », la gestation naturelle de la question sociétale et de l’émancipation individuelle, les Gilets jaunes sont le symptôme d’un retour au social et l’entrée dans une nouvelle temporalité politique. Ils ont été pour le pays l’expression de sentiments mêlés, résultat d’une chimie affective qu’il ne serait pas possible de résumer en quelques paragraphes. Néanmoins, il convient, pour embrayer sur un projet politique vertueux, de détacher les référentiels centraux de leur combat en détachant quelques notions fortes de leur engagement. Observons précisément les ferments symboliques de leur lutte. Dès les premiers jours du mouvement, les renvois à l’imaginaire révolutionnaire étaient constitutifs des codes mobilisés ; par ailleurs, l’acte II des Gilets jaunes a été marqué par l’image forte de ces manifestants défilant en brandissant leur carte électorale au-dessus de leurs têtes.
Voilà ce qui constitue l’âme revendicatrice du mouvement : la volonté de refaire peuple, de recréer collectivement les cadres révolutionnaires anciens et l’imaginaire d’une nation qui reprend par elle- même le contrôle de sa souveraineté. Malgré les discours dominants, qui voudraient faire des Gilets jaunes une masse dépolitisée dont la colère froide s’exprimait de façon archaïque, la notion de citoyenneté y était centrale et structurelle.
Finalement, les Gilets jaunes ne sont autre chose que l’expression d’une France qui existe politique- ment grâce à son histoire républicaine, une nation construite très largement par la lutte et la refondation du bien commun autour de ses services publics. C’est à cette France-là que s’attaquent les politiques néolibérales à l’origine de la dépossession démocratique dont les Gilets jaunes sont la conséquence. La nation politique, mue en nation identitaire, ce qui crée un terreau fertile aux discours communautaires, doit ressurgir pour embraser la plaine révolutionnaire que les Gilets jaunes ont à nouveau investi. Il faut pour cela un projet qui puisse recréer les dynamiques d’une centralité réelle et effective, restructurer et reconstruire un projet pour la France qui ne se limite plus aux querelles de chapelles et qui réhabilite le peuple comme seul souverain.
Un projet qui, sans se préoccuper des dynamiques mortifères d’un libéralisme qui sous couvert d’avancées sociétales parachève et promeut les inégalités sociales, invente de nouveaux clivages pour reconstruire l’idéal républicain au- tour d’un projet radical qui balaie trente ans de néolibéralisme accompagnés par une « gauche » et une « droite » de l’argent qui se réunissent autour des intérêts souverains de la classe dominante. Ce projet doit permettre avant tout de répondre aux attentes d’une France déclassée, éloignée des centres de pouvoir et des cœurs économiques, une France qui se sent exclue d’une République trop souvent incomprise par ceux qui l’essentialisent.
Le point commun des travaux de Christophe Guilluy, Emmanuel Todd et David Goodhart, c’est qu’ils cherchent à redonner la parole à celles et ceux qui, alors même que les services publics et le bien commun sont au cœur de leur quotidien, en ont été dépossédés. C’est cette société-là qu’un projet politique vertueux – voire victorieux – doit construire pour quiconque croit en la République sociale. Trois sujets doivent dès lors être traités – ils sont par ailleurs corrélés les uns aux autres – de façon prioritaire.
Dans un premier temps, l’impératif démocratique doit être valorisé et défendu. Alors que les systèmes démocratiques européens semblent en proie à une grave crise de la représentativité, ce qui pousse de nombreux gouvernements de l’Union à siéger alors même qu’ils sont minoritaires au sein de leur propre parlement, la volonté des peuples de reprendre le contrôle de leur souveraineté se manifeste quotidiennement. Nous citerons ici le renversement de l’ordre social et l’inversion de l’utilité sociale des travailleurs, qui ont abouti en période de crise sanitaire à l’émergence de nouvelles solidarités. En bref, une prise de conscience a traversé le pays : « nous n’avons pas besoin d’eux pour vivre. »
Cette souveraineté populaire, constitue le contenu de ce projet politique. Le contenant a pour trait la souveraineté nationale, indépendance nécessaire vis-à-vis des intérêts étrangers : la France doit apprendre à nouveau à faire primer la voix de son peuple et ses intérêts nationaux face à un néolibéralisme mondialisé qui asservit et prospère en s’asseyant sur les peuples. Comme l’écrivait Friedrich Engels dans la préface de l’édition ita- lienne du Manifeste du Parti Commu- niste, « Sans le rétablissement de l’indépendance et de l’unité de chaque nation […] il est impossible de réaliser, sur le plan international, ni l’union du prolétariat, ni la coopération pacifique et consciente de ces nations en vue d’atteindre des buts communs. »
Enfin, ces deux aspects d’un projet politique doivent avoir comme colonne vertébrale la nécessaire transition énergétique qu’appelle notre époque où l’industrie doit survivre à la crise écologique et se réinventer pour engager vertueusement l’humanité vers une nouvelle ère à laquelle elle ne peut échapper. Néanmoins, cette nécessité écologique ne doit pas se substituer aux droits humains et s’en accommoder.
Elle doit être le fil rouge de la re-construction républicaine attendue par les Gilets jaunes et la France dé- classée, celle sans laquelle une nouvelle politique démocratique et sociale ne pourra pas tenir sur le long terme. Comprendre la société, les rapports de force qui la gouvernent et éclosent sur de nouvelles revendications politiques et sociales, est un prérequis nécessaire et il est de la responsabilité du politique de connaître et de comprendre en profondeur le peuple qu’il gouverne. C’est du peuple lui- même que doit venir l’impulsion politique nécessaire et la structuration de cet espace central qui aura raison du déclassement de toute une partie de la population.
Le mouvement des Gilets jaunes a transformé durablement le paysage politique.