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2. « Nous pourrions décider de qui peut entrer dans notre pays»
3. « Nous pourrions à nouveau décider de nos propres lois »
Premièrement, les économistes estiment de manière consensuelle que le Brexit est la cause de la baisse de 2 à 3 points du PIB britannique (pour ne prendre que cet indicateur).
Deuxièmement, le nombre de réfugiés et de demandeurs d’asile est au plus haut (le Royaume-Uni ne fait plus partie du règlement Dublin), tout comme l’immigration illégale (les small boats, ça vous parle ?), tandis que nombre d’entreprises britanniques (dans la restauration ou l’agriculture par exemple) ont le plus grand mal à recruter.
Troisièmement, en matière de législation, sur les milliers de textes de loi issus du droit européen transposés au Royaume-Uni dont le gouvernement conservateur se vantait de se débarrasser complètement, seuls 700 environ (dont beaucoup de textes obsolètes) ont réellement été amendés ou abrogés.
Les universitaires et les spécialistes s’accordent assez largement sur le rôle majeur qu’a joué le sentiment anti-immigration dans le vote anti-UE lors du référendum. Les dirigeants britanniques qui ont mis en œuvre le résultat du vote l’ont interprété comme l’expression d’une volonté de mettre fin à la liberté de circulation des personnes, ce qui, cela va sans dire, a entraîné la fin des trois autres libertés de circulation européennes (biens, services, capitaux).
Si les Travaillistes semblent donc mieux disposés à l’égard de l’UE, il n’en demeure pas moins qu’ils ont (en tout cas à ce stade) exclu de réintégrer l’Union ou son marché unique, et qu’ils hériteront – s’ils gagnent en effet les élections – d’un état de fait difficile à renverser.
Mais puisqu’il s’agit d’aller de l’avant, pas la peine d’égrener ici la longue liste des maux qui accablent le Royaume-Uni depuis qu’il a rompu avec le club des 27, mais revenons sur ce que 2024 lui réserve. Car 2024, c’est aussi l’année d’entrée en vigueur (entre autres) de nouveaux contrôles britanniques sur les importations, tout comme de l’EES européen. De quoi s’agit-il ?
Lors de la sortie définitive du Royaume-Uni en janvier 2021 (à la fin de la « période de transition »), l’UE a tout de suite mis en place de nouveaux contrôles à l’importation sur les marchandises en provenance de son voisin. Celui-ci, en revanche, a maintes fois reporté l’introduction de nouveaux contrôles sur les importations – notamment alimentaires – en provenance du continent, ce qui va à l’encontre des règles du commerce mondial. Ce nouveau système de contrôle, au doux nom de Border Target Operating Model (BTOM), est finalement entré en vigueur fin janvier 2024. Les contrôles physiques des cargaisons n’ont commencé que le 30 avril, et le système est loin d’être au point, ce qui pourrait détourner du marché nombre de fournisseurs et créer des pénuries bien pires que celles jusqu’ici reportées : en effet, le Royaume-Uni importe jusqu’à 70% (en hiver) de ses produits frais depuis l’UE, et l’accumulation des événements climatiques qui menacent ses récoltes n’aidera certainement pas à réduire sa dépendance.
Dans la même veine, le nouveau système européen d’entrée et de sortie – le (peu) fameux « EES », lui aussi reporté mais qui devrait entrer en vigueur à l’automne 2024 – freinera davantage encore la circulation entre le Royaume-Uni et l’Union, cette fois des personnes. Tous les citoyens extra-communautaires (plus précisément, tous les citoyens de pays tiers à l’UE ou à l’espace Schengen – à l’exception de ceux bénéficiant du statut de résidant) seront tenus de s’enregistrer (avec notamment prise d’empreintes) à chaque entrée et sortie du territoire européen, même pour de très courts séjours. Oui, et ? me direz-vous. Eh bien, pour les Britanniques, cela rajoute encore un obstacle pour se rendre facilement dans l’UE, rien qu’en raison de l’allongement des délais que cela provoquera. Prenons le terminal international de la Gare Saint-Pancras à Londres, d’où partent les trains Eurostar à destination du continent : il compte bien peu d’espace disponible pour installer toutes les bornes d’enregistrement qui seraient nécessaires pour assurer la fluidité du trafic…
Si dans l’esprit de beaucoup d’Européens (comprendre, citoyens de l’UE) comme de Britanniques, le Brexit appartient au passé, maints exemples démontrent qu’il n’en est rien – ses conséquences sont loin d’être résorbées pour les citoyens concernés.
Aujourd’hui, la majorité des Britanniques regrettent le Brexit, et si le Royaume-Uni n’est pas coulé, il est bien touché. Alors, puisque nous, citoyens de l’UE, sommes appelés aux urnes, informons-nous correctement avant de voter, sans nous laisser influencer par les slogans bien tournés mais vides de sens. Et gardons en tête qu’avec le retour de la rhétorique des « grandes puissances » et le changement climatique, l’enjeu n’est pas de savoir si votre première ou prochaine voiture sera française ou allemande, mais si la batterie de votre vélo est européenne ou chinoise.