Figure 1 : Montant des subventions du plan de relance européen rapportées au PIB de 2022[1]
La grande originalité du plan de relance européen est d’être financé par un emprunt communautaire gagé sur des recettes fiscales futures. Il faudra donc s’attendre à ce que le budget européen augmente fortement pour la période 2028-2035 (le budget européen est décidé pour sept ans) puisqu’il faudra rembourser l’emprunt tout en continuant de financer les politiques européennes. La Commission parie sur de nouvelles recettes fiscales, ce qui constitue un enjeu – délicat – à traiter pour la prochaine législature.
Comment von der Leyen est-elle parvenue à avancer dans la voie d’un fédéralisme budgétaire et fiscal ? Avant la crise sanitaire, le gouvernement allemand s’opposait de toute ses forces à l’idée d’un emprunt commun ; Angela Merkel avait même assuré en 2012 que tant qu’elle vivrait jamais il n’y aurait d’« eurobonds ». De même, la création d’une Europe des transferts où les pays d’Europe du Nord financeraient les économies d’Europe du Sud paraissait inenvisageable.
Pour comprendre comment les pays dit « frugaux » ont pu accepter un tel plan il faut rappeler qu’il n’est pas sans limite ni condition. D’une part, il s’agit d’un plan exceptionnel qui n’a pas vocation à se répéter. On est donc loin de la mise en œuvre d’une « Europe des transferts » soutenue par la France et les pays du Sud. D’autre part, il est mis en œuvre dans un contexte où l’Union européenne supervise de plus en plus strictement les politiques budgétaires nationales. L’épisode italien de l’automne 2018 au cours duquel le gouvernement de Paolo Conte, soutenu par le Mouvement Cinq étoiles et la Lega, dû revoir sa copie en dépit d’un déficit prévu de 2,4% (inférieur à celui de la France) a laissé des traces. Depuis la mise en place du Semestre européen en 2011 et du Pacte budgétaire en 2012, la Commission surveille les trajectoires budgétaires de chaque État et peut décider de sanctionner ceux qui s’écartent de leurs engagements, même si entretemps le gouvernement a changé. Dans ce contexte, l’existence d’un plan de relance européen constitue l’assurance, pour les pays les plus attachés à l’austérité, d’avoir un levier diplomatique envers les gouvernements tentés d’y renoncer. Cette conception du plan de relance n’est pas qu’une hypothèse. La Hongrie s’est vue exclue des financements européens en raison de ses manquements à l’État de droit. Le tournant pro-européen de Giorgia Meloni n’est sans doute pas étranger au fait que l’Italie doit recevoir près de 70 milliards d’euros de subventions européennes.
La deuxième raison pour laquelle les pays du Nord, et l’Allemagne en particulier, ont accepté de financer les pays du Sud tient à leur stratégie commerciale. Le modèle de l’économie allemande est menacé par le retour du protectionnisme aux États-Unis et par l’antagonisme croissant vis-à-vis de la Chine. L’Allemagne cherche donc à s’assurer des débouchés en Europe, ce qui suppose de soutenir les économies des pays du Sud.
Enfin si, sur le plan budgétaire, le plan européen semble renforcer la solidarité intra-européenne ainsi qu’une forme de fédéralisme, il constitue dans le même temps une régression communautaire. En effet, la mise en œuvre du plan repose essentiellement sur des logiques nationales. Chaque pays décide de la manière dont il entend dépenser l’argent européen, le contrôle ne se fait qu’a postériori et de manière technique. Ce sont donc des projets essentiellement nationaux que finance l’Union européenne, projets qui peuvent se contredire entre eux. Par exemple, la France et l’Allemagne ont toutes deux décidé d’utiliser les fonds européens pour développer leurs filières hydrogène. Mais les plans allemands et français sont concurrentiels puisqu’ils visent à attirer les investissements des mêmes entreprises. De même, le plan de relance français contient 10 milliards d’euros de baisse d’impôt pour les entreprises, ce qui signifie que l’Europe finance en partie la concurrence fiscale entre États membres.
La même logique de régression communautaire prévaut dans le budget européen 2021-2027 adopté au même moment. La part consacrée aux fonds de cohésion, qui visent à lutter contre les inégalités régionales a été réduite d’environ 11 %, et l’enveloppe de la politique agricole commune a été rabotée. De plus, la part des subventions agricoles allouées nationalement s’est accrue au détriment de la part européenne. Ainsi, les deux politiques emblématiques de la dimension fédérale de l’UE ont été réduites et seront pour partie nationalisée.
En fin de compte, le développement d’un nouvel outil de fédéralisme budgétaire (le plan NextGenerationUE) cache une série de régressions fédérales : le renforcement d’une supervision bureaucratique (et non politique) des budgets nationaux, l’absence de projets collectifs financés par l’argent européen, et une forme de renationalisation dans l’usage des fonds communautaires. Le grand absent de ces réformes est… le Parlement européen qui a de moins en moins son mot à dire sur la manière dont est utilisé le budget qu’il est censé contrôler. Tout se joue entre la Commission européenne, le Conseil et les gouvernements nationaux.
Le marché unique renforce les antagonismes
Du point de vue politique, le plan de relance européen ne peut engendrer qu’une série d’incompréhensions et de frustrations. Les populations des pays riches peuvent légitimement penser qu’elles sont mises à contribution des dépenses des pays d’Europe de l’Est et du Sud, tandis que les populations des pays bénéficiaires peuvent avoir le sentiment d’être prises dans un chantage à la subvention. Dans les deux cas, au lieu de renforcer les liens de solidarité entre pays contributeurs et pays bénéficiaires, ce plan tend à exacerber les tensions nationales. Il n’est donc pas surprenant de constater une hausse de l’influence électorale de l’extrême droite.
On ne peut pourtant pas comprendre l’exacerbation des rivalités nationales sans étudier la manière dont le fonctionnement de l’UE renforce les antagonismes. Dans un article de 2019, j’ai étudié les causes de la crise des dettes souveraines de 2010-2015 et j’ai montré que, contrairement au discours tenu par les dirigeants européens, l’origine de la crise n’est pas seulement la conséquence de défaillances nationales. À en croire les autorités européennes, la crise serait double. Certains pays comme l’Irlande, l’Espagne ou Chypre, n’auraient pas su encadrer leur système bancaire et financier, tandis que d’autres, la Grèce ou le Portugal, voire l’Italie, n’auraient pas su gérer leur politique budgétaire. En réponse à ce diagnostic, l’UE a créé l’Union bancaire, qui consiste à faire superviser directement des banques les plus importantes par la Banque centrale européenne et elle a renforcé le contrôle des politiques budgétaires nationales.
Le problème est que les autorités européennes ont dès le départ refusé d’envisager une seconde option, celui d’une même crise structurelle d’échelle européenne. Pour comprendre cette interprétation, il faut revenir sur les caractéristiques du marché unique européen. Sous l’impulsion décisive de Jacques Delors, la CEE a pris un tournant fondamental en 1986 avec la signature de l’Acte unique. Combiné au traité de Maastricht et mis en œuvre au cours des années 1990, ce traité a consisté à créer un grand marché européen du capital et du travail qui s’est rajouté au marché commun, qui était fondé sur la libre circulation des biens et des services.
En instaurant la libre circulation des facteurs de production, le marché unique a modifié en profondeur les équilibres économiques. Jusqu’à la fin des années 1980, chaque pays disposait de son propre système productif tout en bénéficiant d’une mise en commun de la demande européenne. Les marchandises produites nationalement pouvaient être concurrencées par celles d’autres pays, mais les États contrôlaient la manière dont elles étaient produites et pouvaient mener des politiques industrielles de manière autonome. Les marchés des capitaux et du travail étaient cloisonnés au sein des frontières nationales, ce qui faisait que l’épargne d’un pays finançait en priorité ses propres besoins d’investissement et que les entreprises ne pouvaient pas aussi facilement contourner les droits sociaux en délocalisant ou en faisant appel au détachement.
Avec l’instauration du marché unique, les facteurs de production, et non simplement les marchandises, se sont mis à circuler librement au sein de l’espace européen. L’épargne nationale peut alors financer les besoins d’investissement de n’importe quel pays européen. Les règles de la concurrence ont été renforcées afin d’interdire aux États de mener des politiques industrielles autonomes. Ces derniers ont donc été plongés dans un bain de concurrence « libre et non faussée » visant à attirer les investissements productifs. Un taux de rentabilité de 5% qui, auparavant, apparaissait suffisant pour financer la construction d’une usine, est perçu désormais comme insuffisamment profitable si les conditions de production d’un autre pays voisin permettent 7 à 8% de rentabilité. Le marché unique a ainsi mis en concurrence, non plus les marchandises, mais les systèmes productifs eux-mêmes. Cela a poussé les gouvernements européens à mener des politiques « d’attractivité » afin d’attirer les investissements. Ils se sont mis à augmenter les taux de profits en réduisant les coûts salariaux et la fiscalité pesant sur les entreprises. Certains pays comme l’Irlande et le Luxembourg, puis les Pays-Bas, Malte, Chypre, et depuis peu le Portugal, ont profité de la taille modérée de leurs économies pour pratiquer des politiques de dumping fiscal et attirer une partie des investissements sur leur territoire.
Le problème est que chaque pays ne dispose pas des mêmes atouts géographiques et historiques. On sait, depuis que l’économiste Alfred Marshall en a formulé l’idée à la fin du XIXème siècle[2], que l’industrie a tendance à s’agglomérer. En se concentrant au sein d’un territoire, les investissements industriels tendent à développer des facteurs de production territoriaux spécifiques (infrastructure de transport, main d’œuvre qualifiée, centre de formation et de recherche, etc.) qui rendent chaque entreprise plus performante. Ce développement combiné d’entreprises industrielles et de facteurs de production territoriaux produit un effet d’entrainement qui fait que les territoires les plus industrialisés sont avantagés lorsqu’ils sont mis en concurrence avec des territoires peu industrialisés. Le résultat de cette dynamique est que, à l’échelle du continent européen, la création du marché unique a eu tendance à favoriser la progression d’activité dans les pays les plus industrialisés au détriment des autres. L’industrie européenne s’est donc agglomérée autour de ses bassins industriels historiques connectés aux grands ports de la mer du Nord, eux-mêmes à l’exutoire de voies de communication efficaces. À l’inverse, les pays périphériques d’Europe du Sud et de l’Ouest, mais également la Finlande, se sont largement désindustrialisés.
Dans mon article de 2019, je montrais que c’est cette perte de substance industrielle, engendrée par la création du marché unique européen dans les années 1990, qui est la cause première des déséquilibres financiers à l’origine de la crise des dettes souveraines. En perdant leurs capacités industrielles, les pays éloignés géographiquement du cœur industriel de l’Europe ont perdu leurs capacités à exporter et sont devenus dépendants financièrement des pays du cœur.
Le tableau 1 ci-dessous montre les effets à long terme de cette dynamique de polarisation engendrée par le marché unique. On remarque que les pays qui ont le plus perdu d’emplois manufacturiers (Roumanie, Finlande, Portugal, Grèce, Bulgarie…) se situent tous en périphérie, tandis les pays dont l’industrie a été le mieux préservée se situent autour de l’Allemagne, à l’exception de l’Irlande. Pour ce pays, la dynamique locale de l’emploi est le fruit de la stratégie fiscale très agressive menée depuis des décennies.
Pays perdants | Pays intermédiaires | Pays gagnants |
Roumanie (-35,9%) | Belgique (-18,4%) | Hongrie (-12,7%) |
Finlande (-34,3%) | République Tchèque (-18,1%) | Allemagne (-7%) |
Portugal (-32,8%) | Slovaquie (-18,1%) | Autriche (+1%) |
France (-25%) | Suède (-18,1%) | Pologne (+1,2%) |
Grèce (-24,1%) | Italie (-16,4%) | Irlande (+1,7%) |
Bulgarie (-22,3%) | Espagne (-15,1%) | |
Tableau 1 : Évolution de l’emploi manufacturier de 2000 à 2022 (pays de plus de 5 millions d’habitants)[3]
Afin de comprendre les chiffres indiqués dans le tableau 1, il faut avoir en tête que, sur une période de plus de vingt ans, il est normal que le volume global de travail diminue dans l’industrie manufacturière. Du fait des progrès de la productivité du travail, les pays dont l’emploi industriel a diminué de moins de 15-20% ne se sont pas véritablement désindustrialisés, contrairement aux pays dont l’emploi a baissé de plus de 20% (colonne de gauche) et qui ont clairement perdu en capacités productives. Le tableau montre aussi que les effets de la géographie, même s’ils sont dominants à long terme, ne sont pas les seuls à devoir être pris en compte. Le coût horaire du travail, plus faible en Espagne (22,9€) qu’en France (41,1€), explique sans doute pourquoi ce pays s’en sort un peu mieux que la France sur le plan de l’emploi manufacturier. De même, le coût horaire du travail plus élevé en République tchèque (16,2€) qu’en Pologne (12,2€) explique pourquoi l’économie polonaise attire davantage les investissements industriels, bien que les deux pays soient situés à proximité de l’Allemagne[4]. Enfin, il est à noter que l’Autriche dispose de fleuves navigables et de canaux qui lui permettent d’accéder au Rhin et au port de Rotterdam.
Les migrations intra- et extra- européennes déstabilisent les sociétés
La réorganisation industrielle de l’Union européenne est au cœur de sa dynamique économique et financière, mais elle a aussi des effets structurels sur l’emploi et la démographie. Confrontés à la désindustrialisation, les pays d’Europe périphérique sont contraints de se spécialiser dans des activités à rendements décroissants comme le tourisme, ou de soutenir leur activité économique par le biais de la demande et de l’endettement. Même au sein des pays « gagnants », les effets de spécialisation ne sont pas symétriques. Si l’Allemagne parvient à préserver, sur son territoire, la production de biens à haute valeur ajouté et les emplois qualifiés qui vont avec, ce n’est pas le cas de la Pologne dont l’industrie tend à se spécialiser dans l’assemblage ou dans la production de composants à bas coûts.
En fin de compte, la réorganisation globale de l’économie européenne, poussée par les forces du marché, déstabilise les populations. En devenant une nation d’ouvriers travaillant dans les entreprises sous-traitantes de l’industrie allemande, les Polonais développent une conscience de classe qui se conjugue mal avec la vision éthérée de l’économie promue par les autorités européennes. De son côté, en devenant une nation d’ingénieurs, l’Allemagne attire les chercheurs et les diplômés des autres pays européens. La spécialisation économique participe à transformer les sociétés. Alors que l’Allemagne était en déclin démographique jusqu’à la fin des années 2000, son solde migratoire s’est mis à exploser dans la période récente, en faisant plus que compenser le déficit de son solde naturel. De 2010 à 2022, la population allemande a bénéficié d’un solde migratoire cumulé de plus de 6,5 millions de personnes, le plus souvent en âge de travailler et issues d’autres pays européens. Dans le même temps, d’autres pays se dépeuplent et voient partir leur jeunesse éduquée. La Roumanie a perdu plus de 2 millions d’habitants entre 2000 et 2022 du fait du solde migratoire. En Pologne, si le solde migratoire s’est stabilisé à partir de 2016, cela est dû en grande partie à l’immigration ukrainienne, qui précède l’exode déclenché par la guerre, et qui comble les besoins de l’économie en emplois peu qualifiés dans l’agriculture et l’industrie. Cette immigration récente ne peut masquer le départ toujours conséquent de la jeunesse diplômée, attirée par les salaires de l’Ouest. Quant à la Grèce, elle a payé un lourd tribut démographique à la crise économie. Son solde migratoire, excédentaire entre 2000 et 2009, est devenu déficitaire, l’amenant à perdre plus de 300 000 habitants entre 2010 et 2022[5].
Ces flux migratoires conséquents, liés à la spécialisation des économies européennes, ont nécessairement des conséquences sociales et politiques. Dans un ouvrage publié en 2017, le politologue bulgare Ivan Krastev fait le constat d’une profonde fracture entre l’est et l’ouest de l’Europe sur les questions migratoires. À l’est, le sentiment national est récent et fragile du fait de l’histoire, ces pays ayant longtemps été dominés par de vastes empires. De plus, la manière dont certains pays se vident de leurs forces vives engendre un sentiment de frustration qui nourrit la défiance et le populisme d’extrême droite. Symétriquement, un pays comme l’Allemagne, peu habitué à organiser l’intégration de ses populations migrantes, est confronté aujourd’hui à une immigration historique qui nécessiterait un financement massif de logements et d’infrastructures publiques dans ses principaux centres urbains. Mais empêché par des règles budgétaires très strictes, le niveau d’investissement de l’économie allemande est très loin d’être suffisant, ce qui entraine une dégradation des services publics et une pénurie de logements qui pèse sur l’ensemble de la population allemande et contribue au succès de l’Afd.
Un échec économique global qui alimente le populisme d’extrême droite
Quel que soit le résultat des élections européennes de juin prochain, on ne peut que faire le constat de l’essoufflement du modèle économique de l’UE. Lorsque, dans les années 1980 et 1990, les autorités européennes décidèrent de rompre avec certaines caractéristiques héritées de l’après-guerre (le tarif extérieur commun, la politique des prix garantis dans l’agriculture, la préservation des services publics…) pour adhérer pleinement aux principes du « Consensus de Washington » et créer un vaste marché autour de la monnaie unique, ils ont créé des institutions durables qui ont largement transformé le continent. Les systèmes sociaux et fiscaux ont été brutalement mis en concurrence et les gouvernements nationaux ont perdu les capacités d’orienter leurs économies nationales. Cela a engendré, dans l’ensemble des pays européens, une profonde frustration démocratique qui détruit peu à peu la légitimité de leurs institutions.
Ces derniers mois, l’échec du modèle économique européen est devenu patent. La crise de l’énergie et du marché européen de l’électricité ont mis à jour les limites du management par la concurrence et la croyance infaillible dans la vérité du prix de marché ; la crise inflationniste a elle démontré que la monnaie unique est loin de garantir la stabilité des prix, contrairement à ce que proclament les traités européens ; la rivalité entre la Chine et l’Occident, et le tournant protectionniste pris par les États-Unis montre que la stratégie libre-échangiste de l’UE est de plus en décalage avec la réalité du monde ; enfin, la guerre en Ukraine et l’incapacité des pays européens à approvisionner l’armée ukrainienne en munitions montre les limites de son industrie et sa faible capacité à se réorganiser.
Fille ainée du néolibéralisme, l’UE a bâti un modèle non pas sur des principes de solidarité et de coopération, mais sur la concurrence, le libre-échange et la libre circulation du capital. Ce modèle déstabilise les populations et les sociétés, mais il a surtout démontré qu’il est peu efficace pour produire des richesses. Le fait d’avoir confié la gestion de l’économie aux marchés plutôt qu’aux responsables politiques s’avère être une erreur stratégique. Dans une récente chronique au Monde, le journaliste Arnaud Leparmentier constate que l’écart entre les économies européennes et américaine n’avait cessé de se creuser au cours des dernières années, à tel point que le niveau de vie moyen au États-Unis est désormais 80% supérieur à ce qu’il est au sein de la zone euro. Le gouvernement américain est d’ailleurs en train de réorienter profondément le modèle économique des États-Unis en remettant l’État au centre du jeu. Les dépenses publiques augmentent, quitte à laisser filer les déficits, et cela fonctionne ! Au troisième trimestre 2023, la croissance de l’économie américaine s’est montée à 4,9%, tandis que le chômage n’est qu’à 3,7%. La Réserve fédérale annonce le retour d’une politique de baisse des taux d’intérêt.
Pendant ce temps, l’UE, dont la croissance est atone et où l’extrême droite menace, est confrontée à un choix fondamental. Soit elle transforme son modèle et accepte de remettre en question ses dogmes néolibéraux… soit elle prend le risque d’être bientôt gouvernée par l’extrême droit
Références
[1] Source : « RRF: Update of the maximum financial contribution », Commission européenne, 30 juin 2022 et Eurostat (pour le PIB). Calculs de l’auteur.
[2] Alfred Marshal, Principes d’économie politique, édition numérique, 1890 [1906].
[3] Source : Eurostat. Consulté le 4 janvier 2024. Les pays de faible population ont été écartés du fait de leur sensibilité à des variations ponctuelles d’emploi.
[4] Notons également que la Pologne, contrairement à la République Tchèque, dispose d’un accès direct à la mer du Nord. Source pour les coûts horaires du travail : Insee Référence, Emploi, chômage, revenus du travail, Édition 2023, INSEE, 2023.
[5] Source : Eurostat. Consulté le 4/01/2024.